EP - von Stroheim - The Beautiful, Not the Damned
Navalorama Records/Off Records
( michel)
von Stroheim naît en 2014, pas Erich Hans Carl Oswald Maria Stroheim von Nordenwald, qui en 1926 avait opté pour l'US-amerikanische Staatsbürgerschaft, et excellait dans les rôles de personnages arrogants, lui ayant valu l'étiquette éloquente The Man You Loved To Hate, non il s'agit du trio doom bruxellois, conçu par la prolifique Dominique Van Cappellen-Waldock ( on t'épargne l'énumération de ses multiples projets) et Raphael Rastelli, un complice de toujours, déjà de l'aventure Nutshell, datant du siècle dernier.
Le duo s'est adjoint récemment un nouveau batteur, bien connu dans tous les cafés-concerts situés dans une ligne de circonférence de 500 mètres entourant le pisseur le plus célèbre de la capitale belge, Mister Joe Ree Doo, un des mixeurs les plus stylés de l'Ouest et bien au-delà.
Pour ce nouvel effort discographique ( le troisième), un EP baptisé "The Beautiful, Not the Damned", probablement un clin d'oeil au dandy Francis Scott Fitzgerald, les baguettes sont toutefois encore tenues par Yannick Daïf, qui évolue désormais au sein du duo Djinns.
Tracklist-
Bucketful of Bile.
Poison
Men
Marry me.
Crédits:
Dominique Van Cappellen-Waldock: voice/film samples/theremin
Raphaël Rastelli: guitars/synths
Yannïck Daïf: drums
Recorded & mixed by Raphaël Rastelli.
Artwork ( une ville tentaculaire) by David Crunelle
Nous avions déjà eu l'occasion d'entendre 'Bucketful of Bile' en avril dernier, et avions conclu qu'il n'était pas question de se taper une crise de foie, von Stroheim n'avait pas viré mélasse dégueulasse.
La formule ne s'est pas abâtardie, le trio est demeuré fidèle aux tonalités sombres, aux tempi lourds et accablants et aux atmosphères flippantes.
Dominique se dresse en pythie débitant son discours ésotérique et inquiétant, tandis qu'à l'arrière les Spartiates façonnent un décor monolithique, aux teintes si fortement fuligineuses qu'elles pourraient faire passer les oeuvres de Vladimir Veličković pour une bande dessinée pour enfants sages.
'Poison', il existe des substances toxiques mortelles, style le poison d'Alice Cooper ou celui de The Prodigy, il y a du venin plus perfide, celui qu'administre les starlettes, Nicole Scherzinger ou Rita Ora et puis tu as celui que va t'injecter sournoisement Dominique et son gang.
A la manière d'une fourbe vipère qui se glisse furtivement dans les hautes herbes pour te mordre et t'inoculer le venin qui va te paralyser, von Stroheim recourt à la méthode douce, le tempo léthargique, la voix spectrale, théâtrale, sont destinés à t'ankyloser avant de te paralyser définitivement.
Dominique n'a jamais caché son admiration pour l'univers de Michael Gira, Enablers ou Jarboe, ' Poison' est dans cette veine.
Si Geri Halliwell a cartonné avec la reprise des Weather Girls, ' It's raining men', les ' Men' de von Stroheim sont d'un autre calibre, ni Chippendales, ni sportifs accomplis, ni playboys ou enfants de choeurs, tu les vois plutôt déambuler au crépuscule dans un cimetière désert où quelques sinistres corbeaux planent au dessus des tombes.
Les intonations solennelles dans le timbre vacillant de Dominique Van Cappellen-Waldock, qui déclame son texte plus qu'elle ne chante, doivent enchanter les amateurs de frissons, de messes noires et autres rituels sataniques.
Une proposition pour terminer l'office divin, , 'Marry Me'.
Tu hésites , la marche nuptiale offre des relents de marche funèbre, pas que tu voulais ouvrir le bal sur ' Laisse moi t'aimer' de Mike Brant, mais décidément, ça craint, même si Dominique entame sa complainte d'une voix enfantine.
Après cette descente dans les abysses ténébreux, au plus profond de la déprime, tu aspires à un grand bol d'air frais et pourtant tes penchants masochistes t'incitent à glisser à nouveau la plaque dans la machine, pour une seconde lecture du film noir.
En résumé, von Stroheim tient sans conteste une place particulière dans le paysage rock belge, le groupe, exigeant et intègre , a le mérite de refuser toute concession commerciale, leur troisième recueil, comme les précédents, captive et désarçonne!