dimanche 2 mars 2025

Françoiz Breut au Centre Culturel de La Ville Robert, Pordic, le 28 février 2025

 Françoiz Breut au Centre Culturel de La Ville Robert, Pordic, le 28 février 2025

 

michel

Depuis le premier février  Françoiz Breut  est sur la route pour interpréter ses concerts intitulés  "de l’asphalte au vert organique" , basés, e a,  sur son dernier recueil, baptisé ' Vif'.

Pour terminer ce second mois du calendrier grégorien, la dame de Normandie, Bruxelloise depuis des lustres, s'arrête à La Ville Robert, le magnifique complexe culturel de Pordic.

Si le fascicule annonçait:  

Chant Francoiz Breut
Claviers Marc Mélia
Guitare, basse François Schultz
Batterie Roméo Poirier

c'est finalement, un trio qui, après une brève allocution de  Marie Casagranda,  se présente face à un public discipliné.

Pour ton  quatrième rendez-vous avec l'artiste pluridisciplinaire ( chanson, arts graphiques tendance Dada,  vidéos, photographie, théâtre) , les trois premiers à Bruxelles en 2012/2013 ( deux Botanique et une Maison des Musiques ), tu revois avec plaisir  deux musiciens fabuleux  que tu avais croisés,  l'un avec Lonely Drifter Karen (  Marc Melià Sobrevias.), l'autre avec Hoquets ( François Schultz).

Marc a bien sûr emmené son fameux  Prophet-5 et un autre clavier, et, si on annonce des guitares et une basse ( pas vue) pour François, il dispose également d'un mini drum kit, muni d'un pad et d'éléments acoustiques, Françoiz, chante, non seulement divinement, mais elle se meut  gracieusement, telle une danseuse Apsara , échappée d'un temple khmer, et, de temps en temps, vient aider François en tambourinant le drumpad, quand elle n'agite pas un shaker, du type maracas.

Un orgue solennel sur lequel se greffe de discrètes percussions  amorce 'Hors sol' , au texte sécrétant des relents de mousse, de lichen, de limon et d'autres éléments organiques tentant désespérément de percer la couche de bitume recouvrant la chaussée, la voix, sensuelle,  ensorcelle à la manière des titres les plus terriens de Jean-Louis Murat.

En cinq minutes, Françoiz Breut et ses musiciens ont réussi à nous faire quitter notre monde matérialiste pour nous inviter dans un univers  moins conditionné.

Après cette première plage obsédante, vient  ' La nuit repose' ( un extrait de 'Vingt à trente mille jours', un album  de 2000), un morceau    à l'entame du vent dans les branches de sassafras. D'un phrasé distingué, évoquant Jeanne Moreau, Françoiz Breut chuchote  son texte  sur un fond sonore proche des compositions de Calexico.

En 2015, sortait l'album ' Zoo'  sur lequel on retrouve ' La Conquête'  , une sorte d'  éloge à la lenteur,  bourré d'effets sidérants sur drumming tendu, tandis que d'une voix caressante la chanteuse nous promène dans le jardin d'Eden.

Enfile ton casque de spéléologue, on s'enfonce dans les entrailles de  la terre pour une ' Ode aux vers', vers qui grouillent juste sous nos pieds et dansent sur fond de piano, comme   des worms qu'auraient pu diriger l'équipe de Walt Disney.

Le titre se fond dans ' Juste de passage'  évoquant la marche dramatique des migrants, pourchassés par les forces de l'ordre .

Bruits de claquettes et synthé fuyant  s'entendent avant le martèlement des pas désabusés sur la route, menant nulle part.

 Un titre profond,  chanté d'un timbre aérien.

C'est par des sons flottants et des   coups méthodiques sur les cymbales que s 'ébauche ' Ma Colère', un titre des débuts qui a conservé toute sa force de persuasion .

L'orgue aux effluves Farfisa interpelle,  tandis que telle une ballerine/marionnette  évasive, la chanteuse  se déplace  sinueusement entre ses deux musiciens.

On passe à l'heure du slow moite ( dixit Françoiz), ' Mes péchés s'accumulent',  avec ses images gainsbouriennes , son orgue  Matthew Fisher et sa guitare americana  ciselée , a effectivement tout  pour t'inviter à tournoyer sous la boule  à facettes.

 

Marc est mis à contribution pour assurer les choeurs sur 'Ectoplasme' ,  une plage dominée par un son de basse bien rond.

Pourquoi, ' Ectoplasme', Françoiz?

J'aimais ce mot, il m'a poussée à lire 'La poupée de Kokoshka' de Hélène Frédérick.

Sans toi...  je suis comme Kokoshka sans Alma Malher!

On ignore, s' il est question de cloportes sur le titre 'Métamorphose' , Kafka n'est plus là pour apporter une réponse.

 Le jeu répétitif et la voix enfantine par contre sont là pour nous transformer en feux follets. 

' Crever l'asphalte' offre un petit côté indus  martial, truffé de gimmicks élastiques, alors que la chanteuse s'essaye à un flow Chagrin d'Amour.

' Dérive urbaine dans la ville cannibale' démarre sur des scratches frémissants, le synthé vibre et Françoiz s'essaye à une gymnastique verbale flexible...   le flux flou de la foule... .

Un manège pour neurasthéniques!  

Sur le plus ancien ' La Certitude' , ce sont à nouveau des arômes Joey Burns/ John Convertino qui se répandent dans la salle.

Le morceau précède le hit indie ' Si tu disais', une valse  qui n'a pas pris une ride. 

Après avoir présenté ses compagnons, elle annonce le dernier titre ' Zoo' , un maelström  mariant poésie aux métaphores aventureuses et ondes musicales allant du trip hop  au tribal. 

Exit la chanteuse, François et Marc achèvent la visite du parc zoologique  avant de prendre le chemin des coulisses à leur tour.

Une ovation méritée précède le retour du trio pour un double bis.

Elle sourit, minaude, j'ai écrit une bossa cucul en 2005, ' La vie devant soi'.

Elle est entamée par la guitare  João Gilberto de François, qui se permet  un dialogue Serge/ Jane avec la séduisante Françoiz.

Le symphonique ' Derrière le grand filtre' , fusionnant ingénieusement  l'hispanisme d'un Joaquín Rodrigo et un tempo plus électrique,  termine un concert  enivrant.