Bruce Daigrepont – squeeze box
Pochette: les cinq vieillards sont transformés en malfaiteurs. Un fichier de type Canonge doit permettre à la police scientifique de disposer de tous les signes distinctifs ( photo du visage, taille, tatouages, couleur de cheveux, compte en banque, nombre d'éjaculations précoces, etc...) utiles pour les repérer en cas de délit, dès leur sortie de geôle.
C'est en 1966 que Love sortait '7 and 7 is', un mix de garage et de psychédélisme, déjà repris par pas mal de bands, des Ramones aux Electric Prunes, en passant par Alice Cooper ou Robert Plant. La version de D P n'apporte pas grand chose de neuf si on la compare à l'original, même si le côté démoniaque fait place à un double solo. Steve Morse et Don Airey, les derniers arrivés, sortent l'artillerie lourde pour donner un cachet pourpre au morceau d'Arthur Lee.
Reprendre en plein Covid le vintage rock track ' Rockin’ Pneumonia And The Boogie Woogie Flu' de Huey 'Piano' Smith, c'est pas un peu opportuniste?
Ici encore, Don Ayrey s'amuse comme un petit fou avec un jeu de piano très Jerry Lee Lewis, même s'il avoue s'être inspiré de Professor Longhair. En passant il nous fourgue quelques mesures de ' Smoke on the Water'.
Quant à Ian Gillan , il n'a pas fallu des heures pour le convaincre de reprendre ce classique pur jus , il aime le bon vieux rock'n'roll, comme il le chantait du temps des Javelins.
A noter la prestation consciencieuse de Leo Green et Matt Holland aux cuivres
Sur ' Oh Well' de Peter Green, c'est au tour de Steve Morse de se faire plaisir, il se lâche pour placer un solo en forme de fusée.
Certains regretteront la finesse d'un Peter Green, mais force est de constater que le morceau n'a pas à pâtir des effets épiques imaginés par l'ancien Dixie Dregs.
Il est à noter que Deep Purple a escamoté la seconde partie acoustique et aérienne du morceau pour ne conserver que Part 1.
'Jenny Take A Ride' sonne plus Deep Purple que Mitch Ryder and The Detroit Wheels, une tonalité compacte et la voix légèrement traînante de Ian Gillan attendent le solo du marin amphibie.
Eh, Jenny, sors de ton trou, viens écouter cette partie de piano folle de Don avec un final caoutchouteux, c'est d'ailleurs ce dernier qui a suggéré aux autres d'inclure cette bombe sur l'album .
Et qui pépie joyeusement derrière monsieur Gillan?
Nicole Thalia et Marsha B. Morrison, des nanas qui peuvent arborer une belle carte de visite comme backing singers: Tom Jones, Lionel Richie, les Who pour Nicole, la seconde étant plus spécialisée en gospel.
Plus étonnante est la reprise de 'Watching The River Flow' de Bob Dylan.
Le blues de Dylan, bien aidé par Leon Russell au piano et Jesse Ed Davis aux riffs cinglants , devient rock musclé dans la version proposée par les vétérans anglais.
Un conseil, t'approche pas trop du cours d'eau, si par mégarde tu devais trébucher et te retrouver à la flotte, tu risques de boire la tasse, le torrent est tumultueux.
Les horns à l'honneur sur l'introduction 'de Let the good times roll' de Ray Charles, puis la paire Morse/Airey se paye une séquence jazzy, l'Hammond est particulièrement purulent, mais comme le claviériste a plus d'un tour dans son sac, il embraye sur un solo de piano aux senteurs New-Orleans, ,les cuivres rappliquent et Ian y va de son laïus prophétique.
Quoi, on n'a pas encore placé une ligne à propos du travail de Glover et Paice, ben, non, ces mecs sont des bêtes, tu peux pas trouver mieux comme section rythmique, leur enthousiasme est resté intact après plus de 50 ans passés au service du rock.
Comme le disait le fils d'Alain Poiré, qui carbure à la Williams, les papys font de la résistance et c'est pas demain que les vieux de la vieille vont prendre la direction de l'hospice.
Un petit tour au Tennessee pour faire la connaissance de la ' Dixie Chicken' de Little Feat, une nana aux longues jambes, au sourire ravageur et à la descente pas triste, seul hic, la fidélité n'est pas sa qualité essentielle.
Deep Purple tâtant du R'n'B de la Nouvelle-Orléans, ce n'est pas courant, une fois la surprise digérée tu tu laisses avoir grâce au petit solo introductif que Ian Paice a concocté, le piano dixie de Don Ayrey, décidément très en verve, le timbre sudiste de Gillan et les backings de tonton Bob et de Roger Glover, complètent le tableau.
Argh, les Yardbirds, pionniers du psychedelic rock, le groupe qui a compté en son sein presque autant de guitar heroes que John Mayall ( parfois les mêmes). Des morceaux tels que ' For your love' ' Still I'm sad' ou 'Shapes of Things', avec le fameux solo de guitare de Jeff Beck, resteront pour toujours dans le top hundred des plus grands hymnes rock.
Pour rester à la hauteur, Steve Morse nous livre quelques lignes furieusement inspirées, suivies par une envolée prog de l'inévitable Don Ayrey.
Bien joué, les vieux!
La grosse surprise de l'album restera 'The Battle Of New Orleans' avec son accordéon flon flon (Bruce Daigrepont) et son violon crin crin ( Gina Forsyth).
Bordel, jamais tu aurais cru le mec qui t'annoncerait que le Purple allait virer Pogues ou country, c'est à tel point que le chat et le chien des voisins ont entamé une polka endiablée.
Un jour, Bob Seeger a rencontré ' Lucifer', ça l'a marqué, et voilà que l'ange déchu vient importuner Deep Purple, qui décide de reprendre le rock du bon vieux Bob pour mouliner en roue libre.
Du coup ça remue sec de l'autre côté du Styx.
' White Room' semble avoir été écrit pour Gillan, qui se sent à l'aise dans cette chambre aux rideaux noirs.
La version proposée sur 'Turning to Crime' n'est pas foncièrement divergente de l'original de Cream.
On sent tout le respect que le band voue au trio Clapton, Bruce, Baker.
Puissance, virtuosité et efficacité sont bien au rendez-vous.
Le medley ' Caught in the act' ( près de 8') ponctue l'album, un piano, démarrant en ragtime pour devenir hystérique, invite les danseurs à se démener.
Après 60 secondes, tu reconnais ' Going Down' de Don Nix, un cheval de bataille de Freddie King, 'Green Onions' de Booker T suit, avant un détour vers le Southern rock des Allman Brothers ( Hot' Lanta).
T'es confus, Led Zeppelin aussi, ' Dazed and Confused' déboule pour se fondre dans ' Gimme Some Lovin' du Spencer Davis Group, le pot-pourri s'éteint sur quelques coups de baguettes de Ian Paice.
Quand Deep Purple aura purgé sa peine pour avoir pillé le patrimoine archéologique du rock , il remontera sur scène, d'abord aux States, puis sur le vieux continent, ils sont annoncés au Graspop et au Hellfest.
Tu n'as pas encore ton sésame, c'est le crime du siècle ( merci qui?)!