EP - Gender Studies - M(h)aol
label TULLE
( michel)
M(h)aol, named after an Irish pirate queen, is pronounced “male”, le groupe irlandais ne manque pas d'humour, si tu sais que ses membres se considèrent comme féministes.
Jamais entendu parler, tu dis, t'inquiète, ça va venir.
M(h)aol semble exister depuis 2015, année où paraît le single 'Clementine' qui n'a aucun rapport avec John Ford, ni Henry Fonda.
Cinq années vont s'écouler avant la sortie de ' Laundries.
En 2021, le groupe s'active , un nouveau single 'Asking For It' paraît, qui démontre leur engagement socio-politique , it speaks to the violent cultural misogyny inherent in the murder of Sarah Everard in London et de tant d'autres filles, victimes de brutalités misogynes, il précède la livraison d'un premier EP "Gender Studies", enregistré en 3 jours.
Six titres sur le vinyle, cinq sur la version digitale ( celle qui nous concerne).
1. Gender Studies
2. Desperation
3. Kinder Bueno (Vinyl Only)
4. Laundries
5. No One Ever Talks To Us
6. Óró Sé do Bheatha Bhaile
Line-up:
Róisín Nic Ghearailt on vocals, Constance Keane ( Fears) on drums, Jamie Hyland on bass, il a produit l' EP et ce n'est pas son coup d'essai, il a fait de même pour quelques enregistrement d'autres gens de Dublin, aussi célèbres que James Joyce: Girl Band, Zoe Greenway on bass, and Sean Nolan on guitar.
Artwork: Zoe Greenway.
Une photo en noir et blanc d'un esthétisme rayonnant, deux mains féminines, aux doigts, fins s'élèvent dans les airs, elles semblent vouloir intercepter une bulle, ressemblant au globe terrestre, sortant du cadre du cliché. En arrière-plan, un paysage vallonné fait d'une prairie, la ligne d'horizon la sépare du ciel.
Cartier Bresson s'est dit impressionné!
Avec 'Gender Studies' le groupe oeuvre dans l'urgence. Aux riffs cinglants, semblant sortir tout droit d'une aciérie où le métal en fusion aveugle les pauvres ouvriers sidérurgistes, succède un roulement de tambour mortel, tout baigne dans un fuzz industriel décapant, tandis que Róisín débite son texte d'un timbre froid, évoquant le spoken- word de Kate Tempest.
Tu t'en doutes, il n'est pas question d'un roman à l'eau de rose, comme Harlequin en produit des tonnes, le propos est nettement moins fleur bleue, 'Gender Studies' aborde les relations hommes-femmes, la violence physique et verbale, les préjugés, les insultes à l'adresse des transgenres, l'intolérance et le machisme.
Rarement entendu une entrée en matière aussi abrasive et radicale.
Ô rage ! ô désespoir ! ô vieillesse ennemie ! N’ai-je donc tant vécu que pour cette infamie ?... ce n'est pas la crainte de la vieillesse que RNG vomit en chantant 'Desperation' , les deux basses agressives, la guitare métallique en distorsion, le schéma itératif proposé par Fears, qui martèle les cymbales sans relâche, dessinent un décor sombre et inquiétant .
Mec, ou miss, va savoir, les trucs que tu m'as raconté se sont enracinés dans ma cervelle et franchement ça m'a pas mis de bonne humeur, j'ai qu'un seul corps, tu vois, faut que je le préserve.
De l'air, il me faut de l'air!
' Laundries' sorti en 2020 trouve une place sur l'EP.
Schéma identique, Róisín Nic Ghearailt en spoken-word s'énerve subitement et expulse toute sa rage en poussant des cris hargneux, à l'arrière le bataillon forge un wall of sound sourd, fait de percussions fracassantes, de guitares brouillées et de basses vrombissantes.
Le titre retrace le destin de femmes "perdues" internées dans les sinistres Magdalene laundries ( les blanchisseries Madeleine), déjà dépeintes dans le film 'The Magdalene Sisters' de Peter Mullan.
Tu ne ressors pas tout propre de cette machine à laver infernale!
Le groupe embraye sur un nouveau cri de colère et de dégoût : ‘No One Ever Talks To Us’!
...No one ever talks to us
Unless they want to fuck...
Combien de fois a-t-elle répété no one ever talks to us.... trente, quarante fois?
En tout cas, la phrase, prononcée d'un timbre agacé et désabusé, s'imprègne dans ton cerveau, le décor sonore bruitiste rapproche les Irlandais de groupes tels que Fuck Buttons ou Holy Fuck ou des expérimentations soniques que Lou Reed avait dénommé Metal Machine Music.
Le thème expose une nouvelle fois les démêlés hommes/femmes, les embûches que doivent subir les filles dans un monde dominé par le sexe opposé.
La vidéo, flippante, illustrant la chanson fait référence, notamment, à l'ouvrage de Barbara Creed ' The Monstrous Feminine' qui s'attaque à certains concepts freudiens, notamment celui où il rapproche le sexe féminin d' un monstre mythologique.
Le traditionnel irlandais 'Oró, Sé do Bheatha 'Bhaile' boucle la revue.
Ce 'Bella ciao' irlandais était repris en choeur lors de la guerre d'indépendance irlandaise.
Que les activistes post punk ait ajouté le titre à leur répertoire n'est guère surprenant, la ballade traite de Gráinne Mhaol, alias Gráinne Ni Mháille, la femme pirate aussi célèbre que Vercingétorix chez les Gaulois.
Rebelle indépendante, féministe convaincue, farouche et astucieuse, elle a passé sa vie à combattre l'Anglais qui a toujours voulu faire main mise sur l'Irlande.
Dommage que John Osborne ne soit plus de ce monde, il aurait pu écrire un nouveau 'Look back in anger', cette fois- ci consacré aux angry young women, les filles de Mhaol auraient pu servir de modèle!
Political art existe, ' Gender Studies' en est un satané exemple !