Album - Victoria K – Kore
Rockshots Records
NoPo
VICTORIA K Kore 2022
On retourne la planète vers Melbourne pour
faire connaissance avec Victoria K. A l'envers, ça risque de nous
soulever le coeur mais si c'est pour le chambouler et nous le rendre à
l'endroit...
Son leader? Une chanteuse-autrice-compositrice Victoria
Knight (chevalier in French) et non pas Night (nuit) comme Candice, la
muse de Blackmore.
Victoria aime les jeux de piste, son nom pouvant
apparaitre sous la forme de Kokkinos, puis Knight finalement abrégé en
'K' derrière le prénom pour la dénomination du groupe.
En 2016, elle
publie son premier solo single 'Monster' puis en 2019, elle offre un
autre indice, quant à ses goûts musicaux, avec 'Lacuna' précédant le
premier LP 'Essentia', très bien perçu en 2020, et qui, effectivement
confirme, l'affection pour Lacuna Coil et pas que...
L'artiste cite
aussi les bataves Within Temptation, Delain et les plus récents
canadiens de Spirit Box; on peut y ajouter, sans hésitation,
Evanescence. De grandes voix habituées aux compositions métal souvent
symphoniques.
Après de nombreux concerts, notamment en support
des suisses Eluveitie, bientôt interrompus par la pandémie,
l'australienne s'attache à la réalisation d'un nouveau disque.
L'oeuvre
débarque sur les bases d'un concept album. 'Kore' c'est 'la jeune
fille', l'autre nom de Perséphone, fille de Zeus et Demeter et femme
de Hadès qui l'a enlevée.
Elle passe, chaque année, 6 mois sous terre
en reine des morts, déesse de l'enfer (auprès de son mari) et 6 mois
sur terre (auprès de sa mère) favorisant le retour de la végétation.
Victoria a d'abord conçu les paroles puis la musique avec l'aide du producteur arrangeur Lee Bradshaw, très impliqué.
Ambitieuse,
l'écriture des textes cherche, à la fois, à suivre la chronologie et
l'essence des écrits d'Homère et en même temps, à les transposer dans un
contexte contemporain comme l'autonomie des femmes ou les problèmes
environnementaux.
Avec cet objectif, on ne rigole pas mais la transposition reste un peu imaginaire!
Sur
la pochette sombre (signée, Pedro Sena-Lordigan), Kore et Victoria ne
font qu'une, au milieu de décombres antiques. Elle ressemble à une
statue déchirée, l'aile brisée et le coeur enchainé.
Un bras,
affaibli, essaie de l'agripper. Signe de défaite? Le 'T' de VICTORIA
s'érige en croix et le coeur reste enfermé dans le 'O'. Seul espoir, des
fleurs poussent en 'Kore'.
Un prologue orientalisant, aux chuchotements menaçants, nous force, par des coups violents, les portes du monde de Kore.
Puis
des voix sinueuses enchainent, a capella, sur 'Raptum'. Le riff brut,
tel un ciment épais, projeté par Troy Downward, pose les fondations.
La
voix de Victoria, en extension, est aussi légère que les frappes de
batterie sont lourdes. L'expression première se fait en grec ancien.
Un
clavier lâche quelques syllabes au milieu d'un magma orchestral d'où
s'extirpent les roulements et déflagrations de la batterie.
Un lyrisme exacerbé domine la superbe mélodie.
'Mother's
garden' fait croire au paradis par ses éléments symphoniques, harpe
céleste et cordes sur lesquelles se pose Victoria en chant d'oiseau.
Après
ces 40 secondes de répit, Gerry Pantazis cogne de plus belle et la voix
de Victoria, mezzo soprano, impressionne par sa puissance inébranlable.
Les
guitares s'érigent en murs. Un clavier étincelant tintinnabule plus
loin. Enfin, l'atterrissage des vocalises s'effectue en douceur sur la
mélopée à la harpe.
Un piano ouvre 'The child' poussant une voix
evanescenc(t)e. Le lien s'établit avec le jardin précédent : 'I hold
this child in my hand, and I am lost I walk through my garden, and I am
lost'.
Derrière ce prélude en douceur, la puissance tellurique reprend ses droits. Le rythme orageux fait pleuvoir des cordes.
Un pont reposant accueille une harpe mais c'est pour mieux relancer la matière homérique.
L'intro de 'Persephone' surprend par ses frappes assourdissantes et un riff acéré, arrêté au bout de quelques secondes.
La voix bestiale, crachée, prend la parole, d'abord seule, avant l'arrivée de la basse en ébullition claquée par la batterie.
La
compositrice confie : 'Les idées viennent séparément, le riff, le
refrain, les couplets, le pont avant de trouver les axes pour assembler
le tout'.
Les vocaux féminins viennent se poser sur des roulements
puis le riff tranche dans le vif. Lorsque Victoria monte le ton sur des
choeurs, l'effet devient parfois tempétueux, parfois transparent.
Le
cri exalté de la bête, très présent, alterne avec le chant de la belle,
s'exprimant, une fois de plus, en grec ancien sur un passage.
L'orchestre
symphonique fait preuve d'inventivité pour s'insérer naturellement dans
une interprétation euphorique aux vocalises tournoyantes et qui
s'achève sur une volée de violons.
Des clameurs en cantiques
appellent la voix principale flottante et parfois seule dans 'A Divine
Revelation'. Le déroulé mid-tempo comporte des stops.
Progressivement,
le titre s'emballe, se muscle et laisse émerger une guitare de plus en
plus consistante. Des violons viennent bloquer son élan mais le riff
s'étoffe.
La voix du Gollum ne se réveille qu'en fin de morceau
finissant par se joindre à la femme. La violence s'éteint et quelques
cordes délicates concluent la composition.
S'élève 'Tower' telle
une prière débitée en grec ancien. Le riff qui suit, très attractif,
emporte tout sur son passage et c'est la voix gutturale de Charlie
Curnow qui s'entend en premier.
Lorsque Victoria intervient puissamment, la trame vocale prend des allures éperdues. Chacun sa tour.
A
travers son texte, très platonique, Victoria souhaite faire le
parallèle entre l'édification d'une tour en l'honneur de Kore et la
domination du capitalisme asservisseur dans notre monde.
La basse
blinde la rythmique déjà bétonnée par la batterie. Après un passage
planant répétant en boucle 'Why do I follow you into the dark? ' d'abord
a capella, le chant cérémonial en grec reprend.
Les vocaux death emmêlés aux clairs achèvent le morceau jusqu'au bout des 7'30 dans un bouillonnement effréné.
Un
crachin de piano puis c'est l'hallali sur 'Blasphemia'. La bête prend
les armes en main et la bave en gorge sur un rythme endiablé.
Le timbre suave de Victoria vient la calmer mais le morceau reste intense et agressif dans le ton de Adiant ( http://www.concertmonkey.be/
Toutefois, après un passage grandiloquent, le final file, galvanisant, à travers l'impétuosité de Victoria.
'Pomegranate'
riff grave en laissant la grosse voix démarrer en cadence. Celle de la
déesse arrive par surprise et s'accorde parfaitement avec le démon.
Déesse, démon, les dés sont jetés, lui crie, elle, s'enflamme.
Il
s'agit du premier morceau abouti sur l'album, pareil à un mètre étalon
établissant toute la cohérence des enregistrements à suivre.
Ici,
comme ailleurs sur l'album, certains instruments ethniques se fondent à
l'orchestration : hammered dulcimer (cordes à frapper), touberleki grec
(tambour à main).
'Incorporer des sons de la culture ethnique et de
l'héritage de notre chanteuse est quelque chose dont nous sommes
extrêmement fiers !'
L'histoire relate l'emprisonnement de
Perséphone, 6 mois en enfer, après l'absorption de graines de grenades
et en effet, ça explose! Sacré brûlot!
Le monologue central, récité en grec ancien, s'extrait directement de l'Hymne homérique à Déméter.
Le clip donne vie à l'avatar virtuel de Perséphone et à sa chute en enfer dans un décor qui rappelle la pochette.
La
combinaison des boum boum boum clac demeure omniprésente sur tous les
titres. Ils englobent une partie du son de la basse de Craig Newman.
Le
méchant entame les vocaux de son grain râpeux. La belle adoucit les
moeurs. La trame se dessine dans un balancement rythmique monolithique.
Le coda de 'The Afterlife' aspire guitares, batterie, synthés agonisants pour les expirer en son de harpe.
L'épilogue rend l'âme sur un piano. Quelle bataille! Quelle force de frappe!
Gros
boulot derrière tout ça! On pourrait croire l'album difficile à
encaisser comme les attaques à la grenade mais pas du tout. Le fruit
défendu (ou pas) se délecte.
De là à ce que 'Kore' fasse un score, je ne sais pas. Toutefois l'autrice peut, d' ores et déjà, crier 'Victoire' sans se renier!
Track Listing:
1 - Prologue - 1:09
2 - Raptum - 5:12
3 - Mothers' Garden - 4:34
4 - The Child - 4:01
5 - Persephone - 5:19
6 - A Divine Revelation - 7:09
7 - Tower - 7:29
8 - Blasphemia - 5:43
9 - Pomegranate - 5:52
10 - The Afterlife - 3:58
11 - Epilogue - 0:54
Album Length: 51:25
produced by Lee Bradshaw
All songs by Victoria Kokkinos and Lee Bradshaw
Vocals Victoria Knight
extreme vocals Charlie Curnow
Guitars Troy Downward
Bass Craig Newman
Drums Gerry Pantazis
Keys, synths and sound design Lee Bradshaw
String orchestra Budapest Scoring Orchestra and Moscow Bow Tie Orchestra ('Pomegranate')
arranged and composed by Lee Bradshaw