Broken Mind
Démarrage en mode dendrologique, ' Saule Pleureur' n'offre que peu d'éléments metal, le salix babylonica, dont les branches lourdes penchent mollement au dessus d'un étang aussi romantique que le lac de Lamartine, a ses racines enfouies dans un humus trip hop/ambient aux couleurs nordiques, proches des soundscapes éthérés, chers à Carmen Villain.
Les arrangements minimalistes peuvent aussi renvoyer vers les compositions esthétiques d'Erik Satie. Mais, en contrepoint, il y a la voix, profonde, accaparante, méticuleuse et grisante de Sofia qui te cloue sur ton siège en te refilant des frissons.
Ouah, qui c'est, a interrogé ton épouse.
Un groupe de métal, as-tu répondu.
Tu te fous de moi...
Ecoute la suite, 'Another Kind Of Violence'!
Ah, oui, effectivement, un registre tout à fait différent.
On passe de Portishead à Rage Against The Machine sans transition et, étonnamment, le timbre de mademoiselle Bortoluzzi vire de l'aérien au tempétueux en se collant aux riffs concentrés et au jeu de batterie lourd de ses petits camarades.
Après 150 secondes, l'orage semble s'essouffler, Sofia murmure au lieu de clamer sa hargne, mais très vite les éléments se déchaînent à nouveau et tu entends la belle pousser un cri rauque s'estompant au final.
La suite ' No More Helpful Peace' est explicite, le pacifisme a vécu, aux mouvements follement impétueux, sur lesquels se greffe un chant enragé, amorçant la plage, succède une période moins âpre, introduite par un piano détendu, l'accalmie ne sera que passagère, Sofia, qui se la joue Skin, sans être dénudée au sommet, adopte un timbre plaintif, l'élément masculin ayant repris les armes.
Interlude reposant avec la seconde partie de la séquence, plus proche de Regina Spektor que d' Arch Enemy.
Voltaire était-il le premier adepte du slam?
'Micromegas' te donne un élément de réponse,
No Terror In The Bang ne sont pas les premiers à avoir fait cohabiter métal et hip hop, Faith No More ou Cypress Hill les ont précédés dans cet exercice, que certains estiment contre nature, mais leur conte philosophique, au final rock houleux, convainc et tient en haleine.
Les épatantes capacités vocales de Sofia Bortoluzzi risquent de t'en mettre plein les oreilles!
Intermezzo de 63 secondes, bien pesées, avec '21 grams' avant de passer à 'Poison'.
Alice Cooper n'a pas reconnu son morceau.
Tu dis, ah, bon, ce n'est pas le même venin, effectivement, ce poison repose sur un gentil piano aux allures de musical box, mais le ton est inquiétant, la creepy voice, enfantine, refile la chair de poule, du coup, tu as été vérifié si tu avais fermé la porte à clef et tu as caché un pétard, pas mouillé, sous l'oreiller.
Merde, plus jamais tu n'écouteras de la même manière le thème de 'Rosemary's Baby' de Krzysztof Komeda.
'Insight' englobe les mêmes ingrédients cinématographiques, jusqu'à l'explosion après 120 secondes.
Etonnez-moi, Benoît, murmurait Françoise, on lui refilera l'album des Normands, elle va tressaillir!
A chaque coup tu passes de l'état de somnolence paisible à l'hystérie virulente, sans t'y attendre.
Comme un boxeur acculé, tu tentes d'éviter les coups, mais tu sais que tu ne tiendras pas jusqu'au coup de gong, un uppercut bien placé va t'envoyer au tapis pour le compte!
On finit par saisir les trucs, allez-y, envoyez-nous la petite musique trompeuse, on sait que ' Uncanny' va nous exploser à la gueule, bande de crapules!
Et vlan, déflagrations à la chaîne, shrapnels fulminants, tirs de mortier, si tu t'en tires, t'es bon pour une visite chez le doc qui doit te prescrire les petites pilules qui te libéreront de tes angoisses.
Un petit tour à l'église pour écouter le sermon du ' Preacher of Steel', tu attendais un message de paix, l'officiant n'y est pas allé de main-morte, imprécations hargneuses sur tapis musical abrasif, ne crois pas t'en sortir avec trois Ave Maria, tu dois expier, apprête-toi à souffrir comme le Christ sur sa croix!
Second feuilleton en deux épisodes: 'Memory Of A Waif'.
Partie un, une comptine paraissant bienveillante sur fond de piano et de cordes, néanmoins un sentiment de méfiance s'installe au final.
Partie deux: éveil en sursaut, les fauves sont lâchés, suis le conseil de Lennon/McCartney: ' Run for your life', en slalom, pour éviter les rafales!
Sofia, la furie, exhorte les troupes, ils ont sorti l'artillerie lourde et ne comptent pas s'embarrasser de prisonniers, pas de quartier, Jacques!
Tu t'en es sorti par miracle, la troupe s'est assagie et propose 'Broken Mind' , un requiem lugubre que Sofia ponctue de râles effrayants, après avoir récité son texte de manière théâtrale.
Il était comment le film?
Passionnant et agrémenté d'une B O renversante.
On attend avec impatience le second chapitre de la saga!