We Stood Like Kings : USSR 1926 - Release Party + Support: ENO - Cellule133a - Saint-Gilles, le 31 octobre 2015
Il y a cinq/six ans, tu fais la connaissance de Judith Hoorens lors d'une Soirée Cerise, elle faisait partie du projet Pan Spherics, le postrock pratiqué par le groupe avait laissé une excellente impression à tous les auditeurs présents à La Flûte Enchantée.
Pan Spherics avait sorti une demo avant de disparaître.
Mathieu Waterkeyn et Judith Hoorens se lancent dans une nouvelle aventure aux côtés de Steven Van Isterdael et
Colin Delloye: We Stood Like Kings!
Le band dispute la finale du Kampioenschap van Brussel en 2011 et peu après s'embarque dans une entreprise audacieuse "BERLIN 1927" a live soundtrack to Walther Ruttmann's Die Sinfonie der Großstadt.
Un succès qui demande une suite, ce 30 octobre 2015, une seconde musique basée sur un film muet voit officiellement le jour "USSR 1926" a live soundtrack to Dziga Vertov's A Sixth Part of the World.
Une première live à la Cellule133a, salle complète pour l'occasion.
We Stood Like Kings a invité le duo suisse ENO pour assurer l'avant-programme.
ENO ( Ivo Münger - drums, keyboard et Christian Mikolasek - guitar, keyboard) est originaire de Sankt Gallen et a déjà plusieurs plaques à son actif, toutes disponibles chez Ikarus Records, dernier méfait: 'From The Lower Earth And Ocean' sorti en 2015.
Comme WSLK, le combo suisse s'ébroue dans la sphère postrock, ambient, new age, chillout.
ENO means uncle in Finnish, Christian est d'origine finlandaise, pour ceux qui comme moi pensaient à Brian Eno.
19:50, quelques réglages préliminaires avant la mise à feu, Ivo manipule le laptop pour lancer ' Night was king and reigned unbroken', une longue plage ouvrant leur dernier essai.
Une amorce éthérée avant l'entrée en action des drums et de la guitare.
Apparemment l'inspiration de l'album est à aller chercher du côté d'un poème épique finnois, 'Rune XLVII/The Kalevala ', où il est question d'une sorcière volant le soleil, la lune et le feu des villageois de Kalevala.
Le fond musical est extrêmement harmonieux et se prête admirablement aux rêveries.
Le morceau s'achève en grésillements stellaires suivis d'un grondement annonçant le tout aussi mélodieux 'Northlands old and toothless wizard' décoré d'un spoken-word féminin samplé ( Sylv est le nom de la voix entendue).
Ils poursuivent la lecture de l'album et proposent 'Where a hundred islands cluster', avant d'entendre la même voix off, Ivo sort un gadget de sa sacoche dans lequel il fredonne une mélodie pneumatique mise en boucles.
Les climats feutrés restent propice à la méditation.
Paupières closes, tu imagines un ermite assis en posture du lotus, à même l'herbe, il est entouré de sommets enneigés, un milan noir plane majestueusement dix mètres au dessus de son crâne dégarni.
Rien ne viendra troubler sa méditation.
Très thérapeutique ce postrock.
Présentation du projet, message publicitaire, puis ' How to still the angry waters'.
Il en reste deux, prévient le professeur Tournesol, 'Moon of gold and sun of silver': where Jean Michel Jarre meets André Brasseur and Sigur Rós.
L'ultime paysage sonore a été baptisé 'And the clouds of Northland thunder'.
Un voyage sidéral loin d'être insipide, Brian Eno eût certainement apprécié.
We Stood Like Kings
Sur l'écran ' Shestaya chast mira' = "Sixth Part of the World", un film muet soviétique de Dziga Vertov réalisé en 1926. Sous la forme d'un documentaire, il montre la diversité des peuples d'USSR et la richesse du territoire soviétique.
Ce cinéma-vérité fait l'apologie du socialisme et décrie la décadence de la société capitaliste.
A noter que le compositeur Matteo Bennici s'était déjà attaqué à la mise en musique de ce classique du cinéma de propagande.
Judith prend place à droite de l'écran, derrière un piano, la batterie de Mathieu Waterkeyn est placée à gauche , le bassiste Colin Delloye se plante près des premiers rangs et la guitare de Steven Van Isterdael se colle contre la toile.
Le décor est planté, les images défilent, le band tisse sa toile faite de mouvements apaisés et d'interventions rugueuses, épiques ou tragiques.
La symphonie postrock débute par 'Capital', une guitare lyrique se greffe sur les mesures romantiques du piano, la rythmique semble angoissée, sur l'écran des chocolate kids dansent, ils sont là pour illustrer la déchéance du monde occidental.
Le voyage touristique débute, la construction musicale que tu peux rapprocher des 'Tubular Bells' de Mike Oldfield , tantôt, étaye les vues, tantôt, adoucit la cruauté de certaines prises ou enjolive les moments sombres.
Rien à voir avec le pianiste qui accompagne un Charlie Chaplin muet de manière synchronisée, We Stood Like Kings a décidé de transcender les images, de les utiliser pour magnifier leurs compositions et non pas de leur servir d'anodin support sonore.
Les plages ont pour intitulé 'Downfall', l'eau purifie, le piano apaise, on baigne les moutons... 'Siberian Taïga', on parcourt la taïga à dos de renne avant d'aller rendre visite aux Ouzbeks, aux Abkhazes, Tcherkesses et autres peuples du Caucase.
'Are you a master too' se lit sur la toile.
Horreur totale, a goat slaughter, le ton monte, le fond sonore se fait Explosions in the Sky, puis retour au calme, on survole le 'Kremlin', les champs de blé, de riz, les vignobles... ' Immense Wealth'.
Un break classique, le piano se fait Mussorgsky, la guitare est fluide, la basse accompagne en sourdine, Matthieu se retrouve au chômage technique.
'Caravans', ' Samoyedes', 'The Black Sea' . viennent de passer la revue.
Puis, 'Icebreaker Lenin', Lénine, l'homme de la Lena, décédé en 1924 mais toujours présent dans les esprits.
Dernière phase, ' Volchovstroy'..You are the masters of the world... dit le texte, le soleil se couche sur le Kremlin, la musique languide s'estompe.
The End.
Le public, fasciné de bout en bout par la démarche audacieuse et poétique du groupe, se lève d'un bond et ovationne le quartet.
En novembre We Stood Like Kings va parcourir l'Allemagne, la Suisse, l'Autriche, le Luxembourg pour revenir le 24 du 11 à Mechelen!