Jerusalem in my heart - Ultraphallus à la Rotonde du Botanique, Bruxelles, le 12 novembre 2016.
T'étais prévenu, "les créations hybrides de Jerusalem in My Heart relèvent davantage du happening que du spectacle conventionnel", t'as voulu voir et entendre, t'as vu et entendu, ça ne t'a pas marqué, musique pour bobos, as-tu entendu dire.
Bobo, bobo....le petit bonhomme condamné aux travaux forcés, logeant à Inzepoket?
Te fous pas de nous, ze bobos cherchent à se distinguer à la fois du beauf et de la bourgeoisie mainstream, dixit le sociologue Olivier Donnat, aucun lien de parenté avec une Alice que les bobos ignorent royalement!
Pas trop de monde ce soir, ce qui nous donne l'occasion d'assister au concert les fesses posées sur les gradins.
20:00 Ultraphallus!
C'est moins grotesque que Pénis Ultime.
Le groupe liégeois, né il y a une quinzaine d'années, pratique un rock pas facile à définir, constitué de noise, sludge, metal, et de jazz avant-garde.
Ils sont quatre sur scène: Phil Maggi - vocals, samples, electronics, trumpet, percussion ( non, il n'aime pas le potage en brique) / Xavier Dubois - guitars/ Ivan Del Castillo - bass et Julien Bockiau - drums, comme le public somnolait, ils l'ont secoué par une déflagration terrifiante avant d'attaquer la première de leurs cinq ritournelles, baptisée ' Eva Ionesco'. Eva est la fille d' Irina Ionesco, une photographe qui aurait créé le baby porno.
Cet extrait de l'album 'The Art of Spectres', utilise la langueur martiale et les bruitages caverneux, angoissants, oppressants pour nous amener à nous poser quelques questions sur le sens de la vie.
Tu en ressors écrasé et asphyxié, ils t'attendent au tournant avec ' White Washer' encore plus lent et accablant que la précédente.
Phil Magicolor ramasse un cornet sur la table de chevet, tu te dis que c'est un peu tard pour la Saint-Hubert, il en tire des sons stridents pires que le brame du cerf qui d'ailleurs n'est qu'une attraction pour gogos.
Le docteur Schnollebeek, présent dans la salle, imagine pouvoir s'inspirer de cette composition pour le traitement de ses patients souffrant de troubles psychiques, toi-même, tu penses pouvoir exploiter la chose pour calmer ton irascible épouse.
Tu veux du doom, écoute ' Golden fame' , un barbu surgit de derrière les tentures, il a déniché des baguettes avec lesquelles il s'acharne sur une grosse caisse et, pour faire grincer les âmes sensibles, se met à racler une cymbale abandonnée par l'Armée du Salut après les festivités de Noël de 2009.
Le cornet réapparaît, marcassins, laies et sangliers déboulent, suivis par les blindés de la Wehrmacht.
Bordel, ce film craint!
' Let him be Allistair', c'est vrai quoi, s'il veut s'appeler Allistair, pas de quoi s'énerver, à propos d'où sort cet infernal bruit de train?
L'industriel ' Clever worm' termine ce trip qui n'a laissé personne indifférent!
Jerusalem in my heart
Radwan Ghazi Moumneh: Libano- Canadien, crée le projet Jerusalem in my Heart en 2005. Avec l'aide du vidéaste Charles-André Coderre, qui utilise quatre projecteurs 16 mm archaïques, il nous propose une entreprise musicale et filmique associant sonorités orientales traditionnelles et effets électroniques contemporains.
Le barbu s'installe tout au fond de la scène, sur le mur des draps servent d'écran, son comparse s'assied à côté de la table de mix.
Obscurité totale, Radwan lance une bande musicale phénicienne, traficotée à l'aide de samples, beats et drones, sur la toile apparaissent des images floues, à l'arrière l'antique projecteur grésille.
Ambiance intimiste.
L'artiste se relève pour entamer, en laissant pendre un chapelet entre ses phalanges, un lament extrait de sa dernière oeuvre, 'If He Dies, If If If If If If', cette complainte étant sans doute baptisée 'Al Affaq, Lau Mat, Lau Lau Lau Lau Lau Lau'.
Applaudissements polis lorsqu'il termine le laïus, il ramasse un instrument à cordes ressemblant vaguement à un luth, Bachi te souffle qu'il s'agit d'un buzuk.
Fort bien, il l'a électrifié et à l'aide des samples nous balance l' instrumental ' A granular buzuk', que ton voisin impertinent transforme en un canular bouzouk!
Jeanine entre en transe, cette techno du désert, quoi, pas de désert au Liban, OK, cette techno steppique accompagne fort bien les images projetées, mais personne ne soutiendra que le brave Radwan Ghazi Moumneh soit un virtuose du luth.
Le Khamsin brûlant souffle, tu n'avais pas prévu de keffieh, le sable te pénètre dans les narines et te pique les yeux alors que dehors il pleut!
Debout, il amorce un nouveau chant plaintif, ' 7ebr El 3oyoun 'qui soudain vire dancetrack.
Un blanc, embarrassant, des vibrations, frottements, glissements, oscillations, il a dû visiter la sonothèque, les prémices se prolongent, il se décide à reprendre le buzuk et entame un truc ressemblant vaguement à la danse du sabre d' Aram Khatchatourian, ça reste anecdotique, tu ne cries pas au génie comme certains critiques, l'esthétique du concept t'échappe, tu ne parviens pas à créer des parallèles avec la situation conflictuelle au Moyen-Orient, tu dois être borné!
Sur scène, la performance s'éternise, trois ou quatre clients quittent la boutique en sourdine, JIMH s'enfile un tube dans la trachée artère, râle, se tortille, frémit, grogne, tu souffres pour lui et espères que les résultats de l'analyse de l'oesophage n'indiquent pas une dysphagie quelconque.
Il finit par se ressaisir pour terminer la lecture de 'If He Dies, If If If If If If'!
Bof, bof, bof...désarmant plus qu' exaltant!