samedi 2 mai 2015

Roots & Roses Festival - Lessines - le 1 mai 2015 - Part one.

Sixième édition du Roots and Roses Festival.

A l'aube, le gazouillis des troglodytes, pinsons, fauvettes et chardonnerets annoncent une journée radieuse,  cap sur Lessines en compagnie de fotoman Luk en familie.
Sur place à 10:45', le temps de saluer le comité organisateur sur la brèche depuis des heures, Fred a manqué l'office des Laudes, on fonce vers la Stage 'Roses' où The Glücks doit entamer le marathon dès 11:00.
Fait inhabituel, suite à quelques embarras techniques le concert commencera avec 20' de retard.
Voyons le côté positif, ce laps de temps a permis de peupler décemment la tente, ainsi  la pas répugnante Tina Ghillebert (drums, vocals) et le chevelu Alek Pigor (guitar, screams), alias The Glücks, winnaars van Westtalent 2013, joueront devant une assistance honnête qu'ils n'auront aucune peine à séduire.
Genre?
Non, Philippe, pas de l'opéra  à l'esthétique gluckiste mais du garage neurasthénique à l'esthétique Jon Spencer meets Madensuyu und ze Black Box Revelation.
Un grognement de bienvenue, le garage ouvre ses portes, les mécanos n'ont pas peur de se mouiller, ni de se salir, le cambouis est à l'honneur.
Pas de setlist, niet nodig, mais plusieurs extraits de leur EP au titre  explicite 'Blow my mind'.
Une guitare échevelée ne dédaignant pas la disto, un jeu robuste à la batterie, un chant impulsif et vicelard, le garage dans toute sa splendeur, quoi!
Some rock'n 'roll at 11 in the morning, c'est comme avaler un pur malt au petit déjeuner, mais finalement ce mix de blues crasseux  à la Cramps et de rock binaire, parfois punky, peut remplacer la leçon de gym à la TV.
This song is about something we don't have annonce Alek avant d'attaquer 'Money', plus hargneux que celui des Beatles.
Tina au chant pour 'On the road' pendant lequel son copain se paye un tour sur les enceintes, ils nous balancent encore deux brûlots incandescents, l'un avec quelques relents Janis Joplin puis ce breakfast rock se termine par un plongeon audacieux d'Alek sur la batterie de la petite Tina, surprise par l'idée saugrenue de son copain.
Rock'n'roll!

Scène 'Roots': Boogie Beasts
Nos deux ardennais et leurs copains limbourgeois ont déjà fait cinq fois le tour de la scène blues belge, tu les as croisés trois ou quatre fois, leur boogie /garage/blues plaît aux masses, il te laisse assez indifférent.
A Lessines, Jan Jaspers ( chant, guitar),  Lord Bernardo ( mouth harp) , The Goon Mat ( vocals, guitar) et Gert Servaes ( drums) ont fait ( et bien fait, il faut le reconnaître) ce qu'on attendait d'eux: chauffer le chapiteau à l'heure de midi .
La t° agréable pousse à la consommation, les bières locales, servies par une équipe de bénévoles souriante, a coulé à grands flots.
'BRMC', un premier boogie pas dégraissé,  précède ' Would you please shut up', une prière adressée à une madame dont nous tairons l'identité, si tu reconnais les talents jacasseurs de ta conjugale dans la description donnée par BB, nous déclinons toute responsabilité.
Le  blues enflammé ' Soul on fire'  précède 'Who'll be the next one' de Howlin' Wolf, une version musclée.
Pour les apiculteurs, 'Honey White' et pour les amateurs de Monopoly, 'The game'.
La Wallonie et la Flandre alternent le chant, le brave Gert assure la rythmique à lui seul, le Lord digresse à foison, tout baigne, voici 'Vegas', 'Running like a dog' et le handclapping track 'Hey hey hey'.
On termine façon farandole avec ' Disco blues' dont on aurait pu se passer, ceci dit c'était le titre préféré des folles du coin.

'Roses' Stage : Louis Barabbas and the Bedlam Six.
La foule à Pilate: "Fais mourir celui-ci, et relâche-nous Barabbas.", on crucifia Jésus, Barabbas entre dans l'histoire.
Aber, Louis Barabbas n'a rien à voir avec la Bible, ce gars coiffé d'une casquette plébéienne, grattant une guitare et se démenant comme un beau diable, dirige un combo, the Bedlam Six, proposant un cocktail bien foutu de cabaret/rock/gypsy swing/polka/folk/jazz haut en couleurs et festif.
Myriam te glisse, ils sont de la famille  Urban Voodoo Machine, ces derniers étant plus loufoques toutefois.
Sur scène, probablement: Louis Barabbas aux vocals/guitar - Matthew Cleghorn, coiffure Marty Feldman, pas de strabisme, guitar -  Tom Cleghorn, drums - Fran Lydiatt , claviers - Biff Roxby aux trombones et Dan Watkins, basse.
JP Smismans nous éclaire:  London hospital first to specialise in the mentally ill and origin of the word "bedlam" describing chaos or madness, attendez-vous à un traitement psychiatrique!
L'inquiétant 'Mother' ouvre les hostilités, on sent l'influence de Tom Waits dans ce gypsy rock burlesque.
Merci, bonjour, voici,  ' I ain't done' tout aussi déjanté que sa mère, à Tom Waits, on ajoute Gogol Bordello.
Pendant 'Thick Carpets',  le petit Louis se prend pour Zizi Jeanmaire faisant admirer un jeu de jambes agile qui aurait pu l'amener au Crazy Horse s'il n'avait été chauve.
Les fringants   'Woe Betide You' et 'Tonight' sont tout aussi divertissants, ils précèdent une valse mortuaire, 'The debtor's wife'.
Next one is about a dog, un chien, pour les flamands, ' The tell-tale hound', un charleston canin.
Harry réagit:  I feel like I need to get drunk and have the Big Bad Wolf punch me in the mouth for never hearing this band before.... tu comprends fort bien et commande deux Moinettes, une pour usage immédiat, la suivante pour dans 5 minutes!
Faut se calmer, une ballade, ' Dripping with dew' avant de cavaler avec le diable 'The devil and the hole'.
Il y en a pour tous les goûts, on continue avec une torch song, 'Let me down slow', suivie par l'horrible histoire de 'Matilda and Claude'.
Retour du côté des tziganes fous avec 'Mary', ça déménage sérieusement sur le podium, ça rigole sec  plus bas, puis un gars leur fait signe: plus qu'une, messieurs.
Ce sera le dramatique 'On your own now'.
  Louis Barabbas and the Bedlam Six: hautement recommandable!

The Hackensaw Boys. ( 'Roots Stage')
La coutume veut que Roots and Roses programme un bluegrass act, le choix ( excellent) s'est porté sur les gars de Charlottesville, les Hackensaw Boys, un groupe écumant plus les podia néerlandais que nos scènes nationales.
Le band est né en 1999, le line-up a été fluctuant,  David Sickmen, hello I'm Cassius Clay ( guitare, chant) semble diriger l'ensemble - aux percus ( charismo)  Brian "Nugget" Gorby - fiddle, barbe imposante, Ferd "Four" Moyse - Jimmy "The Kooky-Eyed Fox" Stelling au banjo et Jon Goff est annoncé à la upright bass.
Comme il se doit, ils sont tous sur une ligne pour entamer le set par un uptempo bien emballé.
Le banjo attaque le country suivant, tes pieds battent la mesure, Carole, la cinquantaine pas avachie, lance un  ‘yééhaa’ qui en dit long, l'enthousiasme des Ricains est communicatif, leurs harmonies vocales sont impeccables, au loin deux vaches se font les yeux doux en entendant ce bluegrass appétissant, il est temps de passer à une romance, sinon le lait risque de tourner.
Ce moment de quiétude est vite oublié, les Boys passent à la vitesse supérieure , pour te faire une idée tu écoutes 'F D R', un véritable tourbillon t'invitant à la farandole.
Faut pas venir nous raconter que la country c'est ringard: accords bravaches, cavalcades périlleuses, banjo bondissant, violon plaintif ou allègre, chant choral enjoué et dans ce cas-ci un percussionniste s'amusant avec son brol bricolé appelé charismo, Lessines ne s'est pas emmerdé une minute aux facéties des ces bouseux farceurs et talentueux.
' Ruby Pearl' doit faire fureur dans les saloons en Virginie et ' Dance around' voit quelques madames entamer une country dance improvisée.
Le terminus est proche, deux dernières cartouches dont le midtempo  'You want me to change but I won't' avant de remballer le matos.
Un set apprécié à sa juste valeur.


Au pas de course vers la 'Roses' stage car tu ne veux rien manquer du gig des
 Daddy Long Legs.
L'an dernier le trio mené par Brian Hurd ( mouth harp, vocals) s'est affirmé comme étant  la révélation du Sjock Festival, à Lessines ils ont été le premier groupe a créé un accès d'enthousiasme fort compréhensible, leur trash blues énervé a secoué toute l'assistance.
Ryan Henriquez écrit "Brian Hurd ( aka Daddy Long Legs, car il n'est pas du genre nain de jardin) is  the best blues harmonica player I've ever seen or heard", ses complices valent le déplacement également. Ryan, Murat Aktürk est du genre guitariste flamboyant aussi à l'aise à la slide que dans le power blues aux riffs assassins, aux drums ( un kit allégé) John Styles a un style bien personnel qui groove un maximum.
Le trio débute par l' enragé ' Death train blues', un tortillard qui risque de t'emmener sur les rives du Styx.
On cite la bande annonce judicieuse du Kilkenny Roots Festival: " Daddy Long Legs  growls, barks, yelps, and wails without sounding like an imitation of anyone or anything."
Le trio poursuit par une seconde salve tout aussi fiévreuse  impliquant une visite chez le toubib...I went to the doctor... les bluesmen ont une santé fragile.
Lessines bout, après un troisième rock énervé, le lange décide de calmer le jeu avec le slow blues qui tue,  'Blood from a stone',  Murat faisant admirer tout son talent à la gratte.
Un petit boogie, les gars, dans la lignée du 'Boom Boom' de John Lee Hooker, 'Evil eye', une plage de leur premier LP.
A fond sur la pédale d'accélération, la mobylette sonne comme un hélicoptère survolant les lignes ennemies, voici le pétaradant 'Motorcycle madness'.
John Styles, au devant de la scène, secoue ses maracas, ce ' Chains a rattlin' c'est pas du jus de pissenlits. On passe à un rock fébrile style ' Shakin all over' et sans pause, 1, 2, 3, 4,  'Flesh Eating  Cocaine Blues' pour celui qui tient à maigrir.
Le secouant 'Shackin' up' et sa slide qui patine voit une voisine se taper une crise épileptique, tout le monde s'en branle.
A deux sur les enceintes, en laissant  John Styles derrière sa batterie, ils nous balancent un 'Big road blues' fumeux avant le  rock saignant qui termine ce set brillant.
Détail, John fait allusion à nos Kids en se référant à leur 'Bloody Belgium', nous prouvant que les Ricains ne sont pas tous incultes.
Ne rate pas ce combo s'il remet les pieds chez nous.

Rory Block ( Roots stage)
 Aurora Block, au service du Delta blues déjà depuis 51 ans, 5 Times Blues Music Award Winner, indique que cette tournée is the ‘Final Farewell Tour', une information que JP Smismans semble contredire après avoir causé avec la madame.
Anyway, on voulait y être après avoir, pour la dernière fois, croisé sa route en 2009 au Swing Wespelaar.
Une vieille chaise d'école attend l'arrivée de la frêle sexagénaire, la voilà portant  lunettes de soleil et bottes à talons aiguilles, pas vraiment l'air d'une mamie, Rory!
Celle qu'on qualifie de "one of the greatest living acoustic blues artists” débute par 'Crossroad blues', ce ne sera pas le seul titre de Robert Johnson de la soirée.
Une voix toujours assurée et un jeu impeccable, ça s'annonce bien.
Elle remue sur son vétuste siège, I need another chair, mon arrière-train délicat  souffre, tous les responsables sont au bar, aucune réaction, ok, je planque la serviette, ne vais pas suer, sous mes fesses.
Next  blues is from Son House ,'Death letter blues' , Rory la reine du Delta, faut pas croire ses papiers qui indiquent born in Princetown.
Un petit exposé expliquant les connexions du blues et du gospel pour introduire 'Preachin' blues' du même Son House.
Elle poursuit la lecture de l'héritage Delta Blues  avec notamment une reprise de McKinley Morganfield, mieux connu sous l'appellation  Muddy Waters.
Ensuite elle s'attaque à un  autre géant, Mississippi John Hurt, et à son 'Frankie and Albert', un country blues rythmé.
Après avoir révélé avoir collaboré  avec Steven Johnson, petit-fils de Robert, elle nous propose le fameux 'Me and the devil' avant de choisir Rev. Gary Davis et le gospel 'Lo, I be with you always'.
Les confessions d'une blues singer se poursuivent, Lessines entendra également une Irish ballad aux consonances 'Amazing grace'.
C'est avec son hit 'Lovin' Whiskey' que Rory Block prendra congé de nous.
Un set relativement court, sobre et attendrissant.

End of part one!