Shakespeare Project Trio à la Médiathèque de Guingamp le 23 mars 2019
A Binic, on célébrait Le Printemps des Poètes, notamment en invitant la poétesse Maram al-Masri, à Guingamp, la Médiathèque municipale a rendez-vous avec Shakespeare et organise un concert poético/lyrico/ electro/free jazz du Shakespeare Project Trio, basé sur les sonnets du citoyen le plus célèbre de Stratford-upon-Avon.
A 15h, la salle de spectacle ( de capacité restreinte) affiche complet, un responsable se charge d'une brève introduction avant de céder la place au Shakespeare Project Trio.
On doit la conception du Shakespeare Trio, le français, pas celui de Brighton, à Bernard Lepallec , directeur artistique de l'association Ar Jaz , un collectif proposant un projet de vie musicale autour du jazz et des musiques improvisées.
A l'origine, le projet était prévu pour un septet, il s'est finalement réduit à trois éléments:
Bernard Lepallec aux saxophones, Pierre Stephan :bidouillage électronique ( le bricoleur est à l'origine violoniste et a collaboré avec pas mal de formations bretonnes dont Hastañ, Maëlstrom 4tet, Pennou Skoulm, Le bal tribal des frères Molard, Ronan Le Bars Group, The Celtic Social Club...) et, enfin, le philosophe Steeve Brudey comme récitant/chanteur.
Le parcours de ce dernier, dont le look évoque Seal ( sans la balafre) ou Skin, en moins Skunk, d'après une voisine espiègle, est pour le moins singulier, il abandonne la philosophie pour le théâtre et le chant lyrique, ce qui lui vaut de devenir la voix du « Shakespeare Trio » qui met en musique des sonnets du brave William.
Le collectif a gravé un CD ' Contre ce temps', reprenant plusieurs sonnets sur les 154 édités en 1609. Détail on ignore si l'éditeur a utilisé an authorised manuscript from Shakespeare or an unauthorised copy.
On sait que cette littérature était considérée comme osée, voire obscène au 17è siècle.
En ce samedi après-midi ensoleillé, le trio nous propose huit sonnets, sept d'entre eux traduits par Yves Bonnefoy ou Pascal Collin et un poème en version originale.
La séance est précédée d'un long moment de silence permettant la mise en condition des intervenants, puis la voix de Steeve, solennelle, entame les premiers vers du sonnet 23, en français...
As an unperfect actor on the stage,
Who with his fear is put besides his part... donne, je suis comme un acteur égaré sur la scène qui par la crainte passe à côté de son rôle... Pierre Stephan entre en action en ajoutant des bruitages insolites, d'abord en bruit de fond, puis en avant-plan lorsque l'acteur se tait.
Le texte est mis en loops pour former un canon avec le récitant, le climat créé, chargé de mystères et de Verfremdungseffekten, est propice au recueillement et à la réflexion, d'ailleurs le public, médusé, n'applaudira pas au terme du poème.
Un solo de free sax amorce la seconde pièce, 'C'est vrai, j'avoue' au texte chantonné.
Le public, attentif, retient son souffle, tandis que Steeve Brudey se confesse sans pudeur.
L'émule de Miller Puckette ébauche la troisième phase en façonnant une substance sonore aquatico surréaliste mixant les aventures sous-marines du commandant Cousteau et la Music for Installations de Brian Eno, la composition est troublée par le vrombissement d'un cyclomoteur descendant la Place du Champ Roy, la pétarade ne déconcentre pas le comédien qui attaque 'Contre ce temps', d'abord en forme récitée , ensuite sous forme de lieder psalmodié en contratenor altus, à la manière de James Bowman, le saxophone donnant des touches free jazz à ce mouvement baroque.
Le public, toujours pétrifié, hésite à applaudir, les machines viennent d'entamer, d'une approche wagnérienne, virant sonorités de clavecin, le sonnet suivant, assis sur un siège, tel le Penseur de Rodin, le récitant attend avant de se relever pour pousser un cri d'épouvante ponctué par des crissements effrayants et une note de sax plaintive.
Les hurlements se succèdent avant les premiers vers, 'Honte à toi 'sur fond bourdonnant est entrecoupé de râles et de soupirs tandis que l'instrument à vent divague.
Othello au repos pendant l'amorce trip hop de ' J'ai fait bien attention', débité d'une voix de fausset. Après cette séquence La Cage aux Folles, Bernard Lepallec nous la joue Ornette Coleman et place un solo douloureux.
Un dancetrack techno se greffe sur la tirade puis, d'un timbre de rhétoricien plaçant son discours à Hyde Park, Steeve scande 'Je suis ce que je suis'.
Shakespeare on the dancefloor nous invite à la danse et c'est au terme de ce sonnet techno que Guingamp tape des mains pour la première fois.
Le trio enchaîne sur un chant sacré désacralisé, au texte inintelligible, cette litanie sur fond caoutchouteux est accompagnée par la chorale des condamnés au purgatoire, elle se fond sur le sonnet 66 où il est question de corps vierges offerts à des désirs brutaux.
Une partition lancinante, obsédante, accompagne ce texte puis vient le temps du silence, de la méditation, annonçant une dernière harangue, in English,'Two loves I have', clôturant un spectacle captivant ayant transporté un auditoire médusé dans l' univers fantasque du barde immortel.
On doit la conception du Shakespeare Trio, le français, pas celui de Brighton, à Bernard Lepallec , directeur artistique de l'association Ar Jaz , un collectif proposant un projet de vie musicale autour du jazz et des musiques improvisées.
A l'origine, le projet était prévu pour un septet, il s'est finalement réduit à trois éléments:
Bernard Lepallec aux saxophones, Pierre Stephan :bidouillage électronique ( le bricoleur est à l'origine violoniste et a collaboré avec pas mal de formations bretonnes dont Hastañ, Maëlstrom 4tet, Pennou Skoulm, Le bal tribal des frères Molard, Ronan Le Bars Group, The Celtic Social Club...) et, enfin, le philosophe Steeve Brudey comme récitant/chanteur.
Le parcours de ce dernier, dont le look évoque Seal ( sans la balafre) ou Skin, en moins Skunk, d'après une voisine espiègle, est pour le moins singulier, il abandonne la philosophie pour le théâtre et le chant lyrique, ce qui lui vaut de devenir la voix du « Shakespeare Trio » qui met en musique des sonnets du brave William.
Le collectif a gravé un CD ' Contre ce temps', reprenant plusieurs sonnets sur les 154 édités en 1609. Détail on ignore si l'éditeur a utilisé an authorised manuscript from Shakespeare or an unauthorised copy.
On sait que cette littérature était considérée comme osée, voire obscène au 17è siècle.
En ce samedi après-midi ensoleillé, le trio nous propose huit sonnets, sept d'entre eux traduits par Yves Bonnefoy ou Pascal Collin et un poème en version originale.
La séance est précédée d'un long moment de silence permettant la mise en condition des intervenants, puis la voix de Steeve, solennelle, entame les premiers vers du sonnet 23, en français...
As an unperfect actor on the stage,
Who with his fear is put besides his part... donne, je suis comme un acteur égaré sur la scène qui par la crainte passe à côté de son rôle... Pierre Stephan entre en action en ajoutant des bruitages insolites, d'abord en bruit de fond, puis en avant-plan lorsque l'acteur se tait.
Le texte est mis en loops pour former un canon avec le récitant, le climat créé, chargé de mystères et de Verfremdungseffekten, est propice au recueillement et à la réflexion, d'ailleurs le public, médusé, n'applaudira pas au terme du poème.
Un solo de free sax amorce la seconde pièce, 'C'est vrai, j'avoue' au texte chantonné.
Le public, attentif, retient son souffle, tandis que Steeve Brudey se confesse sans pudeur.
L'émule de Miller Puckette ébauche la troisième phase en façonnant une substance sonore aquatico surréaliste mixant les aventures sous-marines du commandant Cousteau et la Music for Installations de Brian Eno, la composition est troublée par le vrombissement d'un cyclomoteur descendant la Place du Champ Roy, la pétarade ne déconcentre pas le comédien qui attaque 'Contre ce temps', d'abord en forme récitée , ensuite sous forme de lieder psalmodié en contratenor altus, à la manière de James Bowman, le saxophone donnant des touches free jazz à ce mouvement baroque.
Le public, toujours pétrifié, hésite à applaudir, les machines viennent d'entamer, d'une approche wagnérienne, virant sonorités de clavecin, le sonnet suivant, assis sur un siège, tel le Penseur de Rodin, le récitant attend avant de se relever pour pousser un cri d'épouvante ponctué par des crissements effrayants et une note de sax plaintive.
Les hurlements se succèdent avant les premiers vers, 'Honte à toi 'sur fond bourdonnant est entrecoupé de râles et de soupirs tandis que l'instrument à vent divague.
Othello au repos pendant l'amorce trip hop de ' J'ai fait bien attention', débité d'une voix de fausset. Après cette séquence La Cage aux Folles, Bernard Lepallec nous la joue Ornette Coleman et place un solo douloureux.
Un dancetrack techno se greffe sur la tirade puis, d'un timbre de rhétoricien plaçant son discours à Hyde Park, Steeve scande 'Je suis ce que je suis'.
Shakespeare on the dancefloor nous invite à la danse et c'est au terme de ce sonnet techno que Guingamp tape des mains pour la première fois.
Le trio enchaîne sur un chant sacré désacralisé, au texte inintelligible, cette litanie sur fond caoutchouteux est accompagnée par la chorale des condamnés au purgatoire, elle se fond sur le sonnet 66 où il est question de corps vierges offerts à des désirs brutaux.
Une partition lancinante, obsédante, accompagne ce texte puis vient le temps du silence, de la méditation, annonçant une dernière harangue, in English,'Two loves I have', clôturant un spectacle captivant ayant transporté un auditoire médusé dans l' univers fantasque du barde immortel.