Après avoir essuyé une suite effroyable d'averses diluviennes sur l'E 40, tu aboutis à Gand qui inaugure aujourd'hui ses Gentse Feesten, ce qui signifie éviter le centre ville à tout prix.
Direction De Bijloke pour le dernier chapitre du Gent Jazz Festival 2012, top of the bill: D'Angelo!
Places debout ce samedi, jour de fête cocorico et un maigre public, à 18h30', lorsque l'annonceur nous invite à venir écouter
STUFF.
Un collectif monté par le petit drummer Lander Gijselinck ayant remporté le SABAM Jazz Award.
Tu croisas ce féru d'improvisations au Brosella jazz en 2011 où il reçut une carte blanche et secoua le public avec son mix de hip hop/funk/ electronica et avant-garde jazz.
Ce set t'avait surtout impressionné grâce à la présence de la fabuleuse Georgia-Anne Muldrow au chant et spoken- word.
Ce soir on a l'impression que Stuff jouait mainly pour lui et, si le show a enthousiasmé quelques irréductibles, une grande partie du public a écouté d'une oreille distraite ces sonorités plus à leur place dans une discothèque branchée que sur un podium de festival.
Line-up: Lander Gyselinck (drums), Joris Caluwaerts (keyboards, elektronica), Dries Laheye (bass), Andrew Claes (EWI, sax, electronica), D J Menno (turntables).
Un début prometteur avec une chouette version laidback, scratchy et expérimentale de 'Teardrop' de Massive Attack.
La suivante voit des funky beats collés sur un fond sonore sci-fi, ils baptisent leur mayonnaise "Live Glitch Trip Hop", disons qu'on y entend des bribes de Return to Forever assaisonnés de loops et de samples, plus le son particulier du EWI (Electronic Wind Instrument), déjà popularisé par feu Michael Brecker.
Les expéditions hors sentiers balisés se poursuivent, de la fusion scratchée, du hip hop cosmique, du funk déstructuré, de l'acid jazz sidéral, un peu de Herbie Hancock, d'Erykah Badu, The Notorious Big, de Brand New Heavies ou de Loop Guru, de Gerry Mulligan, quand le collectif se décide à jouer la carte traditionnelle, bref un melting-pot décousu qui dura 55'.
L'organisation les remballe sur scène, ils balancent un groove/rap/funk sentant bon le Bootsy Collins.
Au début était le Verbe, et du verbe naquit la matière...
Larry Graham & Graham Central Station
Une dizaine de jours avant le début du festival, Bobby Womack, souffrant, doit annuler sa tournée européenne, les organisateurs lui trouvent rapidement ( chapeau!) un remplaçant au moins aussi attractif, Larry Graham et sa Central Station!
A près de 66 piges, Larry Graham demeure une bête de scène, par un show très pro il a, facilement, mis Gent à genoux.
Avec Marcus Miller, il se partage le titre de roi de la slapping technique sur la quatre cordes.
On va pas te copier sa bio Wikipedia, mais un gars qui est à la base du son Sly & the Family Stone, qui a accompagné Madame Miles Davis, Betty Davis, qui a fait de Prince un fervent croyant, avant de l'accompagner sur scène, c'est pas n'importe qui!
Avec lui, un band à la hauteur de toutes les espérances:
Ashling "Biscuit" Cole - vocals et funkbox
Brian Braziel - drums
Wilton Rabb - guitar
Jimmy McKinney - keyboards
Dave Council - organ!
Quand on te dit que Ashley 'Biscuit' Cole, même les Stones ont utilisé ses talents de vocaliste, valait le déplacement à elle seule, tu as compris que la barre était placée bien au dessus du record du monde de Javier Sotomayor.
Entrée en matière surprenante, la troupe se fait entendre derrière nous et, telle un marching band, traverse la foule , bouscule les photographes pour grimper sur le podium.
C'est déjà gagné, Gent délire!
Une 'Intro' haute en couleur et flashy, tous fringués de rouge sauf Larry, le Jehovah witness, de blanc vêtu.
Un roadie lui apporte sa basse immaculée, il la brandit dans les airs, c'est parti pour une leçon de funk juteuse en slapping et picking, un petit pas de danse pour nous prévenir que l'hospice peut attendre, place au groove: ' We've been waiting' .
Bordel, ça fait du bien, sous tes pieds le plancher, secoué par une centaine de pieds fous, tremble.
Un petit coup de doo wop, quelques figures étudiées, ça pulse à mort, on passe à 'Ain't no fun to me' et ' It's alright to me'.
Sa tunique lui colle à la peau, il n'en a cure et se démène comme un teenager boutonneux.
Il tend son nouveau Cd 'Raise Up' dans les airs , nous signale qu'il le signe après le show et repart sur les chapeaux de roue: 'Raise up' , faut qu'on lève les mains, haut.
Pas de pause, Miss Cole, en montrant le crachin horrible dehors, amorce une des meilleures versions de 'I can't stand the rain' jamais ouïe.
La folie à Gand!
Le chef de gare entame son fameux solo en slapping, tes petites voisines hululent ...ooh, ooh, ooh, ooh... il se marre et reprend de plus belle, épaulé par le costaud Brian aux drums.
La basse est secouée comme un cerisier gorgé de fruits juteux, il change d'avis, décide de faire un petit tour sous le chapiteau, debout sur une table à roulettes, grosse ambiance.
Retour à la case départ, vais me coller contre un haut-parleur, je le violente en douce...vieux, pervers,
et j'achève à la Jimi Hendrix.
Ashling nous présente les Californiens pendant que Larry part changer de tenue de scène, il revient socialiste.
Le GCS attaque 'Release Yourself' qui dégouline comme en 1974.
Let's go back in time, Belgium, du temps où je m'amusais avec Sly et la famille Stone: 'Dance to the Music' , une 'jam' monstre, la fête intégrale... let's party ... ' Thank You'
Une armada qui hurle ...thank you ... FALETTINME BE MICE ELF AGIN... ça fait du bruit, les drôles se barrent en nous laissant finir la rengaine.
70' torrides.
Bis
Brian Braziel en éclaireur, Larry vient serrer des pinces tendues, on invite une vingtaine de spectateurs sur scène, la fiesta pendant 'More Bounce/ Higher' .
Ils partent tous comme ils sont venus, en traversant la masse.
Un showman de première, ce Larry!
D'Angelo
22h45', Gand a déjà poireauté 1/4 d'heure, le présentateur vient s'excuser et signale qu'il faudra encore patienter 15 bonnes minutes.
D'angelo est coutumier du fait, le public d' Eindhoven a attendu près d'une heure avant l'arrivée de la star.
23h, enfin!
Musique de fond Hollywood, courte intro, 'Welcome to the Show', balancée par un band comptant neuf unités et, fermant la marche, Michael Eugene Archer, l'ange nu-soul de Richmond!
D'Angelo prend place derrière les claviers, son groupe, The Vanguard ( la fiche mentionne les noms qui suivent, mais on a compté 9 membres et pas 10), Jermaine Holmes, Kendra Foster au décolleté vertigineux, Jack E King (backing vocals), Isaiah Sharkey (rhythm g), le formidable Jesse Johnson
(lead g.), Cleo' Pookie' Sample, Raymond Angry ( ce dernier étant probablement l'absent!) (keyboards), l'immense Pino Palladino
(bass) qui a accompagné toutes les stars rock ou soul, Chris Dave (drums), Rob
Lumzy ( percussions, backing vc.), attaque un r'n'b gluant: ' Playa Playa'.
Le public a déjà pardonné les caprices de star du 'R & B Jesus' et se laisse porter par le groove sublime distillé par l'escouade du guide spirituel qui se saisit d'une guitare pour le fabuleux 'Feel like making love' hit mondial pour Roberta Flack en 1974.
Un titre soul de son nouvel album ( working title: ' James River') 'Ain't that easy', D'angelo prend le timbre soyeux du pasteur Al Green, Jesse Johnson épate son monde par un petit solo, discret, mais ô combien efficace.
Un signe du nombreux et grincheux service d'ordre: plus aucune photo!
' Devil's Pie' à la Prince/ Rick James, un mec à tes côtés ne jure que par l'échancrure plongeante que la souple Kendra offre à ses yeux, sur scène ils viennent d'amorcer la graisseuse bombe soul/ funk, 'Chicken Grease'.
Tout le chapiteau, en extase, dodeline.
Parliament , 'I've been watching you', slow soul infectieux suivi de 'Shit, damn, motherfucker' encore plus collant et terminé en falsetto.
Une franche crapule, que cet ange!
Accélération et un medley (incluant 'Brown Sugar) déchiré par un méchant duel de guitare D'Angelo/ J J, pendant que les vocalistes arpentent la scène dans toute sa largeur.
Les roadies poussent le Yamaha en avant-plan, solo, un nouveau medley de hits 'Spanish Joint' ( très Stevie Wonder)/ 'Me and those dreaming eyes of mine'.
Gand soupire, le costaud s'installe sur un monitor, reprend sa mélodie sirupeuse, une voisine pleure, retour derrière les touches....un bémol, d'affreux craquements émanant des hauts-parleurs brisent la magie. Il poursuit avec le medley 3 comportant 'Untitled' ( How Does it feel).
Pourquoi n'interprète-t-il pas le morceau entier se plaint Lydia!
Judicieuse remarque et pourtant il continue sous la même forme pot-pourri avec le mielleux 'Send it on'.
Retour de la troupe au complet et du funk, la bombe sexy ' Lady' qui précède la dernière plage, un nouveau titre ( ' Sugar Daddy') , pompant rond comme du Prince (encore) tout en lorgnant vers le Godfather, James Brown!
80' , quite amazing gig!
Gand pourra se trémousser une dernière fois pendant le bis de tight funk avant de tirer un trait final sur ce festival 2012 qui aura ravi!