Judith Kiddo au Barbe, Plouha, le 14 décembre 2024
michel
Tandis que les derniers chalands se pressent face aux chalets érigés pour le second jour du marché de Noël de Plouha, tu délaisses l'Hermine, où doit se dérouler la Méga Boum de Noël, ce n'est pas que l'envie de danser avec Sophie Marceau te faisait défaut, mais tu as très légèrement dépassé la limite d'âge autorisée ( 17 ans) pour participer à la sauterie.
Conclusion, tu te consoles en assistant au concert de Judith Kiddo au Barbe.
Non, Judith Williquet n'a pas décapité Holopherne, elle s'ébat dans un univers synth pop, mariant beats électro et fraîcheur printanière.
Depuis 2019, la jeune bruxelloise abreuve la Belgique ( et quelques podiums français) avec son kykeon acidulé et pétillant.
Un premier full album, 'Ready to heal' a vu le jour en 2023, il était précédé d'un EP en 2022.
Depuis, Belgium's favourite synthpop queerdo, si elle ne repose pas sur de frais lauriers, n'est plus entrée dans un studio d'enregistrement.
T'as fait deux pas dans le café-concert, quand un des musiciens de Judith t'apostrophe:
Eh, t'es pas de Bruxelles... t'avais pas prononcé un mot, ce n'était donc pas l'accent frites/mayonnaise/manneken pis, qui lui avait suggéré ce rapprochement.
Effectivement ta route et celle de Clément Marion se sont croisées quelques fois, au sein de son groupe JoieJoieJoie ou aux côtés de Faustine Hollander et même comme musicien chez Lonely Drifter Karen.
Décidément, le monde est petit et rempli de débits de boissons!
Clément a encore trainé avec Castus, Ada Oda, Le Colisée, Aksak Maboul, Lomboy et quelques autres, il est impliqué dans le projet Judith Kiddo ( guitare, synthé, backings vocals) depuis les débuts.
L'équipe est complétée par d'autres musiciens affichant un bristol imposant: à la basse et au synthé, uit Mechelen/Antwerpen: Caitlin Talbut, aussi active chez Bluai , Blond, Plush baby, quand elle ne se produit pas en one woman act. On drums: César Laloux: cité chez Ada Oda, Motalcombat, The Tellers, BRNS, Italian Boyfriend, The Archbishops.. et tête pensante du festival La Carrière à Bioul.
Et Judith, rien à dire?
Si, Kiddo est plus proche de Kidding que de Kūdō!
Quand elle ne chante pas et ne gratte pas une guitare, on peut la voir au cinéma, ou comme danseuse chez Ultima Vez de Wim Vandekeybus.
20:45, devant un public restreint, faut penser aux cadeaux, à la dinde, au foie gras, au saumon, aux bulles, au Bourgogne Aligoté et aux Nuits Saint - Georges... Judith Kiddo entame son aubade par une intro mélodieuse et flottante baptisée ' Interludix', un interlude que certains n'hésitent pas à comparer au chillout tracks concoctés par Air ou par les fabuleux Röyksopp.
Interludix se meurt sur de tendres vocalises pour se fondre dans 'Pour quelques dollars' . Pas de fusillades intempestives, ni d'échos à Sergio Leone ou Ennio Morricone, on nous refile des billets verts synthétiques, sur beats futuristes juteux.
L'argent n'a pas d'odeur, mais ces dollars dégagent un léger parfum de fantaisie très agréable.
Judith ramasse une guitare avant d'attaquer 'Hanky Panky' , un titre qui ne plaira pas aux machos adorant donner la fessée à leur petite amie, mais qui nous rappelle que Madonna a enregistré un morceau du même nom.
Ils sont deux ( Judith et Clément) à haleter avant d'entrer dans le vif du sujet, pas de fessée pour nous mais une grosse claque, néanmoins.
La gestuelle de Judith et le fond sautillant, ont inspiré un couple arrangé, carburant au rhum, ils improvisent une danse de leur cru, plus empirique qu'esthétique !
Toujours in English, voici 'The strong ones let it out'' un midtempo mélancolique, proche de la dreampop, même si le propos n'est pas fleur bleue.
L'intro Lennon/McCartney de ' Hagen' n'a aucun lien avec le punk de Nina, J K ( initiales pas choisies par hasard) rend hommage à son frère Hagen Williquet, lui aussi artiste et sortant, comme toi, d'une école bruxelloise.
Ce titre délicat est décoré d'un solo de guitare lumineux, confectionné par Clément.
L'aérien 'Mal Barre' nous invite à un trip céleste qui ne polluera pas l'atmosphère, ce synth pop gentiment dansant et léger comme une bulle de savon, voit les ballerines de tout à l'heure s'essayer à une chorégraphie étudiée proche du voguing.
Le show gagne en effervescence et en effets bleep bleep avec le très dansant et irrésistible ' Settle down' suivi par 'Only loves me when I cry' aux touches Kylie Minogue appuyées.
Quelques effets de slide, savonneux, précèdent un virage disco beats caoutchouteux du meilleur effet.
L'électro forain 'La joie, l'espoir' nous invite à danser dans les fleurs. Après avoir batifolé comme un papillon ou une libellule, t'as droit à une menthe à l'eau.
Puis vient la claque magistrale, avec la reprise toute personnelle et électrique de 'Beautiful Stranger' de Madonna.
Demain tu téléphones à Marc Collin pour lui proposer de reprendre ce titre avec Nouvelle Vague.
Le Barbe, on suppose que tu aimes Magritte et Delvaux , tu risques de craquer pour 'Serpent Cheval' , un titre ambitieux, mariant éléments pop et envolées psyché.
Clément à la fête, multiplie les trouvailles, Caitlin, qui a reçu la guitare de Judith, l'accompagne à la rythmique et à notre gauche, César cravache sec, tandis que dans les airs s'envole le cerf-volant à tête d'équidé et au corps reptilien.
Mon chien se nommait Pollux, il n'avait pas de frère du nom de Castor, il n'aboyait pas en grec, mais je lui dédie le titre ' Petit chien' qu'il entendra peut-être au paradis des cabots.
'Ready to heal' le titletrack de l'album démarre comme une sucrerie à l'américaine, au parfum Frankie Valli prononcé.
Comme l' affirme Judith, la musique peut guérir , donc, flanque ta collection de médocs à la poubelle ( ou ramène les chez l'apothicaire pour éviter de souiller la planète) et soigne - toi avec ses sons.
Vas-y, César, plaque-nous deux ou trois accords de guitare pour entamer la dernière du set, 'Fly away' qui combine astucieusement groove, errances oniriques et quelques éléments orientaux.
Rideau... she fades away, comme le chantait Alphaville, en nous laissant avec de jolies bulles dans la tête!
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