Le Fuchsia coloured vinyl est inséré dans une pochette dont le graphisme peut faire penser aux oeuvres du graveur Frans Masereel.
Du noir et blanc comme pour les lithos du peintre né à Blankenberge et aussi du rose, tu cherches encore un lien entre les différents croquis: des yeux hagards , des marches d'escalier, des nuages, une créature harassée se déplaçant avec difficulté... t'as voulu appeler Ernst Ludwig Kirchner, spécialiste de l'expressionnisme du début du XX è siècle, il n'a jamais décroché son portable
Le premier single 'yeah, mud!' ouvre le recueil, et dans cette fange, tu les imagines s'envoyer des mottes gluantes sur la tronche, pas forcément pour rire.
Musicalement , les gars de Glasgow t'envoient un monolithe compact.
En grattant, pas avec les mains nues, fais gaffe, c'est rêche, tu découvres des traces de post punk, de post hardcore brut, de punk sale et terreux, de noise, bref ça délire sévère.
Andreas Christodoulidis, qui a écrit les textes, a, dans ses rêves ( cauchemars), aperçu un Cosaque à l'article de la mort. Avant de voir ses tripes s'échapper de son bide, ce soldat écrit un mot à sa maman. Pour mettre tout ça en musique, il fallait des guitares acérées, une basse au galop et un drumming forcené, sans oublier une voix écorchée, venant corroder ton cerveau, bref le genre de truc pas banal qui accroche d'emblée.
On se demande toujours ce qu'Andreas a avalé ce matin pour éructer d'une voix de barjo salement ravagé ce ' pure misery' qui fait passer Johnny Rotten pour un enfant de choeur.
Sur un jeu de batterie rudimentaire et méthodique, les guitares giclent et viennent te fouetter en pleine figure. La folie frénétique du chanteur a réussi à effrayer ton chat parti se réfugier sous le canapé.
Et l'autre qui tient absolument à attirer ton attention...I’m the one with the band, man.. les mecs derrière moi m'ont demandé de chanter , j'ai rien répété, je le fais en freestyle. C'est pas un flow rap, plutôt du slam qui dérape et cogne dur, tu t'en tapes, moi, aussi, je m'en fous, si ça te plait pas, tu écoutes Justin Bieber, pigé!
Le décrassage du cerveau se poursuit avec ' dogs' , un morceau qui a du chien et fait référence à la mythologie grecque, ce qui n'est pas anormal, vu la résonance hellénique du nom du frontman.
Démarrage placide avec roulement de batterie inoffensif et riff de guitare léger, le chant est, cette fois-ci, relativement calme.
Etant Breton, tu sais que cette météo sereine ne va pas persister, en effet des stridences aiguës et des beuglements rageurs jaillissent, faut dénicher un refuge car les gentils toutous se sont transformés en loups.
'alive and well' est construit sur des guitares dissonantes et un drumming féroce, tandis que le chanteur s'égosille à faire éclater ses poumons.
Il tente une explication ...I wanted the vocal to sound like somebody drunk and feeling sorry for themselves.", le résultat est à la hauteur de ses attentes.
Sur ' jeans' , le mec hésite entre bégaiements, balbutiements et borborygmes maladifs, ses copains lui forgent un fond post punk frelaté ( quelle basse, bon dieu !) à rendre malade les Suédois de chez Viagra Boys, pourtant habitués aux traitements radicaux.
‘good boys remember well’ ne va t'apporter aucun soulagement, le ton est toujours aussi désespéré, le fond sonore aussi chaotique. Pour les lyrics, Andreas Christodoulidis semble s'être basé sur le naufrage du K-141 Koursk pendant un exercice de la marine russe, il relate et scande les faits comme rapporté par Wikipedia... official reports in the basement, 118 dead, what about 23 in the sixth through ninth compartment?...
L'amorce dramatique ( pour qui sonne le glas) fait place à une narration étouffée qui se greffe sur une texture sonore sombre et dérangeante, elle te tient en haleine jusqu'au final foudroyant.
Le groupe sera à l'affiche de plusieurs festivals cet été, il est annoncé en France du 31 mars au 7 avril, sept dates pour lesquelles les tickets se vendent à la vitesse de l'éclair.