Neu Sierra - EP - Sulfur & Molasses
Label : FIVE FOOT ONE Records
Par NoPo
NEU SIERRA Sulphur and molasses EP 2021
L'artiste danoise intitule son EP 'Soufre et mélasse' et le moins qu'on puisse dire est qu'on souffre pour elle en l'écoutant.
Pourtant, il s'agit d'une mixture censée rebooster après l'hiver (une cuillère à café de soufre, 2 de mélasse)!
'There is nothing magical about the combination of blackstrap molasses and sulfur, except that it does work as a laxative'
Ah bon, c'est la même incidence avec le disque? Pas vraiment!
L'accueil par l'artwork dérange quelque-peu.
Une photo polaroïd, mal cadrée, met en évidence le ventre rond de la
chanteuse. Un top noir cache sa poitrine et une partie de ses bras; on
ne voit ni ses mains ni le bas de son corps.
Elle tient une rose blanche entre les dents. Une note manuelle mentionne
son nom sous la photo, posée sur un tapis de roses artificielles et de
quelques bulles transparentes, où figure aussi le titre.
Le tout baigne dans ce qui ressemble à une mélasse de sang.
Le monde trouble du personnage? Neu avoue sur son Facebook : une part de
saloperie, une part de grâce, une part d'autoharpe (son instrument au
look de cithare qu'elle serre contre elle).
Déroulons les 5 beaux titres perturbants.
La batterie caressée, comme une voiture balaie, ramasse les effondrés.
La chanteuse a beaucoup de mal à se relever jusqu'à conclure 'Dirty me'.
Elle a tout oublié de sa soirée de débauche. La guitare ou/et
l'autoharpe jouent sur des effets à réveil douloureux et des arpèges
réverbérants parfaits pour le mal de crâne.
La voix fatiguée ('Ayayayayay') articule peu, au point d'avoir du mal à la comprendre.
Des vibrations électriques s'insinuent d'emblée puis, cette fois, ce
sont basse et batterie qui résonnent. La guitare plaque ses plaintes.
Une seconde voix double la principale sur le refrain. Les paroles
décrivent les choses 'For the last time', parfois bordées de tambours
martiaux.
L'ambiance irrespirable étouffe autant que certains morceaux de Joy Division.
Un bruit insidieux et déchirant ouvre la voix.
La batterie résonne incroyablement et la basse s'y noie.
Les guitares réveillent le refrain 'I go with grace' sans joie.
Les mots de l'artiste font toujours mal à son moi : 'Anger' 'Sadder' 'Disillusion' 'Weak' 'Misery'
Les phrases frappent fort 'I’m going nude you hide your face And when I
dance upon your grave you go to waste' comme un direct au foie whoah
whoah whoah...
La balade 'Boy of a 1000 tears' semble un monument national, repris par
beaucoup d'artistes. Le producteur Nils Lassen l'a écrite dans les
années 80.
La version de Aud Wilken, aux faux airs de Bjork, la modernise. Celle de
Neu Sierra, beaucoup plus brute, me fait penser aux Raveonettes.
La mélodie colle à la mélancolie des paroles, presque trop sage pour Neu Sierra.
Des crépitements électriques démarrent le dernier titre 'Darkness fire you'.
Le ton baigne encore dans une grande tristesse.
Le son des guitares/autoharpe effleurées s'allonge en écho dissonant et légèrement strident.
La basse roule derrière la batterie dont l'impact se propage.
L'obscurité de la nuit n'aide pas Neu à dormir. Le feu ne la réchauffe pas... 'Will you, my love?'
L'interrogation déchire le coeur et la dernière déflagration des cordes, lancinante et répétitive nous achève.
Pas vraiment relaxant, mais tout sauf mélassant!
Cette gravure, sombre et grave, impressionne par sa profondeur (comme un Nick Cave millésimé).
Elle sent le soufre et le stupre.
A son écoute, on perd des couleurs autant qu'on gagne en émotions vives.
Il paraît que quand ça fait du mal, c'est que ça fait du bien... à ne pas prendre au premier degré!
Les pistes :
01-Dirty me
02-For the last time
03-I go with grace
04-Boy of a 1000 tears
05-Darkness fire you
NEU SIERRA says :
All instruments by Nils Lassen, Tomas Ortved and me
Vocals by me
Produced by Nils Lassen
Mastered by Tommy Steuer
Artwork by Benjamin A. Wendelboe
FIVE FOOT ONE Records
Sur scène en Mai à Copenhague, les musiciens suivants l'accompagnent :
Tomas Ortved (Sort Sol), Nils Lassen (BlackieBlueBird), Mathias Gørtz (Leizure) et Manoj Ramdas (Les Raveonettes)