Royal Street - Place du Centre- Guingamp, le 16 juillet 2020
Côtes-d'Armor, juillet 2020: si les grands événements de l'été n' ont pu avoir lieu par la faute d'un maudit virus tardant à plier bagage, plusieurs communes invitent pourtant Costarmoricains et touristes à des manifestations musicales de nature plus intimiste.
Lamballe, Hillion, Pléneuf-Val-André, Tréguier, Plérin, Binic, Loguivy, Dinan, Guingamp....les activités ne manquent pas!
Les Jeud'His de Guingamp proposaient Royal Street en ce 16 juillet relativement ensoleillé.
Si ce n'était la grande foule, l'affluence était plus qu'honnête pour assister au concert du groupe de Douarnenez, qui succédait à une sieste musicale animée par Julien Tiné et ses platines.
Le quintette, ayant choisi comme nom de baptême l'une des artères les plus commerçantes du French Quarter de la Nouvelle-Orléans, propose un bouquet fleuri composé de ragtime, swing, traditional jazz, marching band music, de rythmes afro-cubains ou de jazz blues sentant bon la pre-war ( second war) period.
Tous les férus de Louis Armstrong, Jelly Roll Morton, Fats Waller, Sydney Bechet, Bix Beiderbecke, Count Basie, Big Bill Broonzy, Washboard Sam, Jack Teagarden... et ceux qui ont adoré l'album 'Jazz' de Ry Cooder, devraient succomber au répertoire de Guillaume Feuillet ( vu avec les Beanshakers) : vocals and guitar/Jérémie Elis : vocals and trumpet/Guillaume Le Guern : clarinet, sax/ Tsunam : washboard, quincaillerie diverse ( sonnette de tricycle, boîte de Campbell's soup sans étiquette et sans potage, percussions au pied...) et backing vocals/ ou Jonathan Caserta : upright bass.
Mise à feu avec l'instrumental 'Second Line' ( 'Joe Avery's blues' ) une marche que Wynton Marsalis a glissée dans son répertoire .
Le ton est donné, l'assistance bat des pieds, les chaises sautillent, Guillaume et Jérémie ponctuent le tempo par des hey hey conquérants, ça galope joyeusement, la guitare se paye une échappée western swing, la lingère la rappelle à l'ordre par un coup de sonnette sec, puis c'est au tour du sax de prendre le large.
Guingamp a le sourire.
Virage jump blues avec le ' T Bone Shuffle' d' Aaron Thibeaux Walker, plus connu sous l'étiquette T-Bone Walker.
La mute trumpet n'a rien à voir avec La Muette de Portici, ça remue sérieusement, le swing dégouline, trois ou quatre auditeurs ont entamé un jive pas débile, ils sont observés par un pigeon étonné qui finalement opte pour un bain dans la fontaine.
' Rider Rider Blues' de Big Bill Broonzy voit Guillaume troquer son saxophone contre une clarinette et c'est Jérémie qui saisit le micro pour 'Buddy bolden's blues' de Jelly Roll Morton.
Un blues narrant la sombre histoire d'un alcoolique aux tendances suicidaires.
En route vers les Bahamas à l'ère de la prohibition, le ' Bellamina' , un navire blanc que les marins ont peint en noir ( c'était avant les récentes manifestations) pour décharger une cargaison illicite en pleine nuit.
Les autorités n'y ont vu que du feu.
Ambiance tropicale sur la place, coconuts and palm trees, manquait qu'une jolie Caribbean girl!
Un second Big Bill Broonzy au menu: " Big Bill Blues (These Blues Keep Doggin' Me) ", le pauvre s'est fait larguer.
...She said "Goodbye Big Bill, I will see you in another town
Now you know I'm lonesome... je dors seul dans le grand lit.
Un enterrement en Louisiane se déroule en musique, voici la suite ' Just a closer walk' , là, tu pleures/ 'Oh didn't he ramble', là, tu danses, éventuellement, tu lèves le coude!
Retour au blues avec 'When I Get To Thinking',.
Faut jamais refiler son chéquier à ta tendre moitié, surtout si elle a un amant.
Jérémie s'essaye avec succès au scat sur 'Humming to myself' et le 'All by myself' qui suit n'est pas celui d'Eric Carmen, encore moins une cover de Celine Dion, il s'agit d'un morceau rythmé de Big Bill Broonzy.
Retour dans le quartier français de la Nouvelle-Orléans pour le fameux ' Basin Street Blues', suivi par le ragtime 'Rag, Mama, Rag' de Blind Boy Fuller, dictionnaire d'argot non fourni!
Ce set, apprécié à sa juste valeur, s'achève par 'I've Found a New Baby'. Pour les guitaristes, on propose Charlie Christian, pour la clarinette, Sydney Bechet , pour les Manouches, Stéphane Grappelli.
Un bis, Messieurs?
D'accord on vous ramène à Nassau pour une seconde version de 'Bellamina'.
Guingamp insiste.
Et, nos crêpes, rétorque Douarnenez?
Allez, on vous refait la suite funèbre: 'Just a closer walk'/ 'Oh didn't he ramble' et on enterre la hache de guerre.
Pas de bisous, Covid oblige!