mercredi 11 juin 2025

Festival Art Rock jour 3- Cat Power ( Grande scène) - Saint-Brieuc, le 8 juin 2025

 Festival Art Rock jour 3- Cat Power ( Grande scène) - Saint-Brieuc, le 8 juin 2025

michel

Le 5 novembre 2022 , Cat Power (  Chan Marshall)  se produisait au Royal Albert Hall à Londres pour reproduire le show que Bob Dylan avait donné au Manchester Free Trade Hall, le 5 mai 1966.

Le concert a été enregistré pour devenir l'album  "Cat Power Sings Dylan: The 1966 Royal Albert Hall Concert" qui nous vaut la tournée de la singer-songwriter d'Atlanta.

Par deux fois, tu as croisé sa route à Bruxelles, la première fois au Botanique,  où sous l'emprise de la boisson, elle a gratifié le public d'un concert  confus, elle oubliait les paroles, jouait faux, riait comme une andouille, à tel point que les musiciens ( doués) l'ont abandonnée à son triste sort pour regagner leurs loges.

Pitoyable et pourtant t'es fan.

Quelques années plus tard, c'est au Cirque Royal  que tu revois la fantasque Cat Power, un concert moins déglingué, qui n'a toutefois pas convaincu toute l'assistance.

Cat Power s'est créé une réputation: une habituée des concerts chaotiques,  voire foutraques , donnés par une dépressive alcoolisée.

Et pourtant, t'es toujours fan!

Aujourd'hui Chan a 53 ans, physiquement elle est méconnaissable, sa voix aussi a changé, comme seules boissons sur scène, elle tolère l'eau et le thé.

La désintox semble avoir fonctionné.

Tout était parfait ce soir alors?

Pas tout à fait, le concert est divisé en deux, une première partie acoustique dépouillée,  épurée jusqu'à l'os, où elle est accompagnée  du jeune  Henry Munson à la guitare et d'  Aaron Embry, à l'orgue , à l'Hammond   et à l'harmonica.

Chan face à un pupitre, sur lequel repose les lyrics des chansons, semble concentrée, la voix est fragile, moins nasillarde que celle de Bob,  l'atmosphère est au recueillement sur les titres proposés, ' It's all over now Baby Blue', ' Just like a woman' après lequel elle s'autorise a sip of tea et 'Mr Tambourine man'   lugubrement désossé et interprété d'une voix cassée, heureusement les lignes d'harmonica d'Aaron sauvent la mise, mais on est très loin de la version des Byrds.

On commence à paniquer, c'est propre, poignant à certains égards, mais ça manque de balls, on craint un départ précipité d'un public pas à 100% anglophone.

Tout va changer avec l'arrivée du full band,  Henry passe à la guitare électrique, Aaron traverse le podium pour prendre place derrière un piano ( un vrai) , Jordan Summers le remplace à l'Hammond, Adeline Jason vient s'ajouter  à la guitare rythmique, Erik Paparozzi à la  basse et Joshua Adams aux drums. 

Et là, le concert prend une autre dimension, comme si le Band accompagnait Bob Dylan.

On passe de l'époque Greenwich Village à l'électricité, certains fans du début ont crié à la trahison, pas nous,  mais en France,  il a fallu attendre Jimi Hendrix et Hugues Aufray pour comprendre l'importance capitale  de Robert Zimmerman  dans l'univers rock .

Une première salve juteuse vient éclairer le ciel, Saint-Brieuc réagit avec ardeur à la version musclée de ' 'Tell me, Momma' , un morceau que le Bob n'a inclus sur aucun  album studio, mais qui en 1966 a enflammé l'Olympia.

'I don't believe you' ( she acts like  we never have met) s'entend sur  "Another side of Bob Dylan" de 1964, en version acoustique dramatique, et en mode rock'n'roll en 1966, accompagné par The Hawks qui deviendront The Band plus tard.

Les lignes  d'harmonica  d' Aaron doivent surnager   dans ce déluge de guitares, de claviers collées sur un fond rythmique  consistant.

A Manchester, un gars dans l'assistance invective Bob et gueule ' Judas', réaction du Zim ...guys play it fucking louder'!

On n'affirmera pas que le Band a inventé l'Americana mais il a largement contribué à sa diffusion!

Le traditionnel blues/ folk  'Baby, Let Me Follow You Down' est attribué à Eric von Schmidt, un gars ayant influencé Dylan, Joan Baez ou Tom Rush.

L'orgue Hammond, les notes du piano,  les riffs de guitares  tout contribue à rééditer le concert légendaire de 1966.

Un sommet difficile à égaler.

Quelques notes de piano entament  'Just Like Tom Thumb’s Blues', une des perles à retrouver sur 'Highway 61 revisited', le phrasé narratif de Chan, le jeu en retenue du groupe frappent les imaginations.

T'as frémi de bonheur et de gratitude.... les Byrsds, Buffalo Springfield, Tom Petty, les Traveling Wilburys,  les Flying Burrito Brothers, plus tard Wilco, Uncle Tupelo , les Jayhawks,... tous ces artistes catalogués roots rock ou  alt country ont toujours rythmé ton existence, c'est cette musique  et le blues qui remuent tes tripes. 

Hey baby, je vois que tu portes ton nouveau chapeau rond en peau de léopard, wouah, tu vas faire tomber les mecs comme des mouches, quelle classe! 

' Leopard-skin pill-box hat ' ou comment se foutre de la balle d'une nana en enfilant des gants.

Ce morceau sautillant nous confirme que la machine est bien huilée et que Cat Power se sent à l'aise avec le répertoire de Dylan.

Joshua a sorti les balais, pour ' One too many mornings'  , on n'a pas entendu les clebs aboyer, on a bien ouï un harmonica  mais c'est l' Hammond,  la guitare fluide  et la voix implorante qui ont  bercé nos  âmes.

Les critiques se sont toujours demandés qui était le Mr Jones dépeint par Dylan dans 'Ballad of a Thin Man'....  un journaliste indélicat?

 Le morceau,  lent et tendu, aux lyrics dadaïstes,  n'a pas encore révélé tout son sens 60 ans après sa sortie, avec son piano gospel et l'orgue d'église, il impressionne toujours autant.

Le contrat prévoit une heure de concert, elle quitte son siège, abandonne les lyrics pour une dernière salve, grandiose, le fameux ' Like a Rolling Stone'.

 

Chapeau bas, madame,  vous nous avez époustouflés!