dimanche 2 juin 2019

Do The Dirt et Sanseverino au Trieux Tonic Blues, salle polyvalente, Lézardrieux, le 31 mai 2019

Do The Dirt et Sanseverino au Trieux Tonic Blues, salle polyvalente, Lézardrieux, le 31 mai 2019

Treizième édition du Trieux Tonic Blues, un festival étalé sur trois jours, proposant 14 concerts dont neuf sont free of charge.
Les concerts payants se déroulent à la Salle Polyvalente de Lézardrieux ( le jeudi est gratuit), les autres dans différents établissements de la presqu'île.
Le festival coïncidant avec La Morue en Fête de Binic, tu choisis de t'y rendre le vendredi, l'affiche, alléchante, proposait Do The Dirt et Sanseverino.


Configuration des lieux idéale, restauration à l'extérieur, merchandising dans le hall et buvette dans le complexe sportif, plus grand qu'une salle de concert moyenne.
Les bénévoles se montrent souriants et performants, l'équipe organisatrice n'est pas en reste, tout est clair et ponctuel, ce qui n'est pas toujours le cas ( certains festivals n'affichent aucun horaire et laissent le public dans l'incertitude), à 20:53', un responsable annonce Do The Dirt, ravi de commencer quelques minutes avant l'heure prévue, ils pourront aligner un ou deux titres supplémentaires.

Do the Dirt.
Non, il ne s'agit pas de gamins jouant dans les poubelles, mais d'un duo parisien pratiquant un blues minimaliste, sentant bon le Mississippi, le hill country blues rural et poussiéreux d'où sont absents les artifices et la forfanterie.
Guillaume Arbonville (batterie)  et Nicolas Moulin (guitares et voix)  ont pondu deux plaques,  "Black Snake" (2015) et "Useful Junk" ( 2017), elles serviront de toile de fond au set donné face à un public, relativement nombreux, attentif et expert.
'Black snake' ouvre, le reptile, sournois, se faufile  nonchalamment dans la végétation, dense,  t'étais tellement occupé à écouter ce blues lancinant que t'avais pas aperçu l'incarnation de Satan, tu ne dois ton salut qu'à un voisin, attentif, qui d'un coup de talon lui a ôté l'envie de te mordre.
On passe à la vitesse supérieure, déclare le duc d'Arbonville, et c'est l'histoire du 'Poor boy' qui nous est narrée en noir et blanc, la TV couleur n'est pas dans ses moyens.
Le   récitatif  'Going down south', rythmé à la cadence Pow-Wow, précède 'Gypsy Woman', une obsession pour pas mal de bluesmen, dont Muddy Waters, Watermelon Slim ou l'immense Rory Gallagher .
Un autre  classique, ' Cherry ball blues' de Skip James éblouit les puristes amateurs de Delta blues un brin cafardeux, mais le blues n'est pas forcément triste, 'Poor Black Mattie' de RL Burnside est carrément dansant.
Normal, c'est un boogie!
Un plongeon en 1936 pour 'Kind hearted woman blues' de Robert Johnson, le leitmotiv du blues y est... I love my baby, my baby don't love me..., trop affligeant, m'en vais boire un coup!
Du fric, on veut du fric, Macron... 'Money (that's what I want)', non, Lennon et McCartney n'ont pas composé ce standard, il est signé Berry Gordy et Janie Bradford.
La version Do the Dirt est rugueuse à souhait, elle est suivie par le slow blues 'Come back, baby' avant de revisiter McKinley Morganfield à la mode africaine, 'Can't be satisfied', ce qui est loin d'être le cas de l'assistance qui savoure.
Après les remerciements d'usage, les gars de Paname nous balancent un 'Catfish blues' bien assaisonné.
Pas dégueulasse les  Do the Dirt, qui rappliquent pour un bis alerte et loufoque,  'Give me back my wig' qui n'est pas de la plume de Donald Trump.

 Sanseverino
A l'inverse de  Saint Séverin de Paris, Stéphane Sansévérino n'était pas attiré par une vie contemplative, ce qui l'intéresse c'est la scène ( la musique, l'improvisation théâtrale, le cirque), accessoirement la politique et le vélo.
Ses détracteurs estiment qu'il a une grande gueule, c'est ce qui plaît à ses fans.
Il vient de sortir 'The Beber Project Vol. 1', un album de reprises en hommage à François Béranger,  il  succède à 'Montreuil-Memphis' de 2017.
Il a tâté au manouche, au swing, au bluegrass, à la country, à la valse musette mais pas encore à la house French touch.
A Lézardrieux, le cowboy de Lutèce est accompagné par de fines lames: le jazzman, roi du groove, Didier Mouret aux claviers ( Dany Brillant, Carol Fredericks, Jazz Mood Trio...), Stéphane Huchard aux drums ( Tania Maria, David Linx, Gino Vannelli, Romane, Jacky Terrasson...) et Marko Balland,  l'homme aux 36 harmonicas , quatre albums à son actif et de multiples collaborations ( Mathieu Pesqué , Ronan "One Man Band"...).
Sanseverino vise l'assemblée: ne croyez pas que je vais donner un concert devant des gens assis, ce n'est pas la salle d'attente de la Sécu, tous debout et frontstage, exécution...
Nous sommes nombreux à avoir obtempéré, les autres subiront les sarcasmes du gaillard pendant tout le concert.
On y va?
Oui, mais 'Pas à Lafayette' , du blues cajun bien juteux permettant à Didier Mouret de placer un impromptu à la Fats Domino.
Une entrée en matière tonitruante truffée d' un texte plein de gouaille.
Les gens assis, ils ont le bénéfice de l'âge, mais, merde, ils me dépriment, bon, en pensant aux chasseurs, voici ' Touche pas au grizzly'.
Tu dis, Gaspard, Gabin, mais non, c'était  touchez pas au grisbi!
Après avoir rangé sa Winchester, celui qui est plus Village que People attaque 'Maigrir' , un blues manouche dédié à Mike Brant,  dont on extrait  la phrase qui tue ..j'étais mince comme un pied de micro...  spécial anorexie!
Tu sais que les astronautes souffrent d'escarres à force de rester assis ,  'Astronaute', et ses relents John Lee Hooke,r nous narre les mésaventures d'un cosmonaute en fin de carrière.
L'harmonica gambade, les autres turbinent, la fusée tourne rond, tout baigne.
Et pour les dix British pas encore brexités voici, ' Tigerman', à la manière d'Elvis.
Rock'n'roll is good for the soul, même si tu vis dans la jungle.
Sanseverino a consacré un album à Papillon ( Henri Charrière), il nous narre la triste histoire de l'homme à 'La jambe de bois', une joyeuse tranche de cannibalisme ou un barbecue organisé par des bagnards homosexuels, dixit Marius de La Ciotat.
On devait assurer le refrain, ça a été dur sans éclater de rire.
Corde pétée, Stéphane et Didier, improvisez s v p, après la jazz jam dégoulinante, le quartet embraye sur ' J'ai toujours cru que j'avais la classe', un titre narcissique à prendre au degré deux.
A fond la caisse, les amis, ' Montreuil/Memphis' avec quelques flash back audacieux, Elvis qui joue aux boules avec Johnny Cash, une pincée de Smoke on the Water, envoyée en douce, un Mannish Boy passait également dans le coin , bref, la totale!
Assez ri, it's time to rock, qu'il dit avant de balancer ' Nénette' en mode boogie.
Marko nous distille une intro John Mayall ( à l'époque où Papy avait encore du souffle) pour ébaucher la biographie de 'Freddy' , un playboy normand au cerveau léger qui bouffe des bigorneaux  truffés de manganèse et roule en Méhari.
Voilà, c'était le dernier chapitre, je vous présente les copains et on se tire.
 Pardon, un bis?
Je suis bon prince, vous avez droit à un double rappel: ' A mon enterrement' sans la fanfare de la New-Orleans mais il y aura à boire, et enfin, 'Magouille blues' de François Béranger , un titre composé en 1974, toujours criant d'actualité.

Tu veux un remède contre la morosité ambiante, tu te tapes un concert de Sanseverino!