mardi 20 janvier 2015

Cécile McLorin Salvant & Aaron Diehl Trio - Flagey - Ixelles, le 19 janvier 2015

  À ne pas manquer au  Brussels Jazz Festival  Flagey: la franco-américaine
Cécile McLorin Salvant, disait la pub, qui, une fois n'est pas coutume, ne mentait pas!

Ta première rencontre avec Cécile McLorin Salvant date de 2013, en juillet, elle fait une apparition fracassante comme invitée lors du concert de Jacky Terrasson au Gent Jazz.
Aussi, cris de joie lorsque l'affiche du Brussels Jazz est publiée: le 19 janvier au Studio 4: Cécile McLorin Salvant... alléluia, alléluia, et il ne s'agit pas de la pâtisserie de Castelnaudary, ni d'un cycliste d'Aix-les-Bains, amateur de gingembre.

La lauréate ( à 21 ans)  du premier prix du concours international de jazz vocal Thelonious Monk ( 2010) , a, enfin, sorti un premier album officiel, après l'auto-produit 'Cécile', et la presse ne tarit pas d'éloges à propos de ' WomanChild'.
Déjà comparée aux plus grandes, Cécile, aussi à l'aise dans la sphère jazz que dans la planète lyrique, reste modeste, souriante et drôle.
Elle aura séduit le public bruxellois, venu en masse, pour assister à un numéro magistral, fait d'aisance, d'aplomb et de grâce, digne d'un récital d'une Sarah Vaughan, voire d'  Ella Fitzgerald.
Le trio l'accompagnant est de premier ordre, il est mené par le pianiste  Aaron Diehl, auteur de trois albums, à la contrebasse, un complice de longue date, Paul Sikivie et aux drums, the exquisitely tasteful Lawrence Leathers.

Paul et Aaron sont les premiers à faire irruption, rejoint peu après par le batteur, quelques mesures pour s'échauffer, Cécile McLorin Salvant , affublée de ses lunettes à énorme monture,  à son tour descend l'escalier d'une démarche altière, elle saisit le micro, la voix ample, claire, limpide vient caresser nos pavillons...Never, never will I marry
Never, never will I wed
Born to wander solitary
Wide my world, narrow my bed...
' Never will I marry' from the Broadway show "Greenwillow", une composition que même Anthony Perkins a chantonné.
Les indécis, velléitaires et autres touristes sont d'emblée conquis.
En français impeccable, la native d'Haïti nous narre comment elle a pour la première fois entendu le thème des 'Parapluies de Cherbourg', elle ne connaissait pas le  formidable film de Jacques Demy et   la non moins magique bande-sonore de Michel Legrand avant de voir le film dans un cinéma d'Art et Essai lyonnais.
Premiers frissons, elle a déjà réussi à  transformer plusieurs auditeurs en porc-épic.
D'un ton enfantin Miss  McLorin Salvant entame ' If this isn't love', un titre repris, e.a., par Fred Astaire.
Début léger, un caprice voltigeant au gré d'une brise peu farouche, puis vient une admirable intervention du pianiste, le morceau s'emballe, avant de revenir s'éteindre en toute sérénité.
Après Charles Trenet, ' La route enchantée', parfumée et printanière, elle attaque la fameuse hammer song, ' John Henry', reprise par tout le gotha folk US.
La Grammy nominated entame le traditionnel façon gospel, tenant le micro à 30 cm de l'organe vocal, accompagnée par la contrebasse subtile de Paul.
La plage prend de l'ampleur avec l'entrée en piste du piano et de la batterie, puis vire rondo infernal, le public se tait, la diva décide de finir le titre a capella, une voisine tremble sur son siège avant de crier son admiration après les dernières notes.
Phénoménal!
Changement de registre avec la romance "I Didn't Know What Time It Was,"que l'on peut entendre sur l'album.
Attention titre casse-gueule: 'What a Little Moonlight can do' enregistré par Billie Holiday en 1935.
Spotlights dirigés vers  Lawrence Leathers, un solo radieux, Cécile McLorin Salvant appuyée au piano nous tourne le dos, imprégnée par son chant profond, elle a pris le relais avant de se permettre quelques voltiges de trapéziste volant  oeuvrant sans filet.
Bruxelles retient son souffle, le majordome a décidé de sauver la vaisselle en cristal de Bohème, pas assurée contre les extravagances de cantatrices style La Castafiore, imperturbable, la mezzo achève le morceau avant de sourire au tonnerre de battements de mains  ponctuant l'assaut final.
Elle se propose de nous interpréter une chanson d'actualité en pensant à Cabut, qu'elle a bien connu, l'émouvante  vieillerie en noir et blanc  ' Laugh, clown, laugh' .
Bruxelles, les larmes à peine séchées, oubliera ces moments de tension et rira à la version coquine de 'Si j'étais blanche' de Joséphine Baker.
Emotions, chaleur, humour et une voix incomparable, Cécile McLorin Salvant brille de mille feux!
Toujours en mode spirituel, Broadway mood,  la chanson du tramway ou ' Trolley Song', popularisée par Judy Garland .
Exit bass and drums, un duo piano/voce, un nouvel highlight, 'Mon Homme' de Mistinguett.
Retour de la rythmique pour finir le set avec le mambo ' You Bring Out The Savage In Me ' de la trompettiste Valaida Snow.
100' de facture exceptionnelle.

Bis
Le standard  'Let's Face The Music And Dance', 1936,  Irving Berlin.
Sourires, merci.... personne ne quitte le Studio, second rappel, même époque, 1933,   'You're Getting To Be A Habit With Me'.
Fabuleux!

Et si ce 19 janvier on avait déjà assisté à un des concerts de l'année?