dimanche 15 janvier 2023

Dead Chic au Barbe à Plouha, le 13 janvier 2023

 Dead Chic au Barbe à Plouha, le 13 janvier 2023

 

michel

Pour le premier concert de 2023, le Barbe, full house pour l'occasion, accueille Dead Chic.

Non, Bérénice, tu confonds, il n'y a aucun poulet trépassé à l'horizon et tu ne verras aucune nana ayant oublié de respirer, Dead Chic est le nom du combo rock constitué en 2020, à l'instigation d'   Andy Balcon, excuse my French, I'm from Leeds et de Damien Felix, un des 260 188 habitants du 39 ( oui, c'est le Jura).

Andy en avait un peu marre des duos, s'étant impliqué pendant des années au sein des furieux  Heymoonshaker, groupe qui avait sérieusement secoué  Bruxelles, en 2016 lors du Brussels Summer Festival, (en regardant les clichés pris par ton pote JP à l'époque, tu te dis que le brave Andy a mûri), avec Damien ( Catfish et Bigger, vu à Plouha cet été) , il recrute deux autres pointures, Rémi Ferbus,  batteur  pour Kimberose ( superbe concert à La Grande Ourse) et  Charles Pasi, plus  l'as des claviers ( Moog et Farfisa) Mathis Bouveret-Akengin,  actif au sein de Malibu, Eméa, Neptune Quartet ou Catfish.

Tout ce beau monde, comme le font dorénavant les joueurs de foot quand ils passent sur le petit écran, s'embrasse avant  de fourbir leurs armes.

Donc, deux Gretsch ( Damien et Andy), un batteur et un claviériste, Andy chante, tous les autres assurent les backings,  et des recommandations à l'adresse de Yann, responsable de l'éclairage, s v p, pas de vert, du coup Yannick Jadot tique.

Un gros coup de fuzz pour la mise en route, puis une attaque agressive qui amorce ' Pain Love Joy', un programme décrit par pas mal de poètes en herbe.  

Les guitares éraflent nos tympans, Rémi, qui n'est pas sans famille, bien aidé par Mathis, assure un rythme altier , mais ce qui frappe, d'emblée, c'est la voix rocailleuse,  malgré tout chaude, du British.

T'as pas encore envie de citer Tom Waits, ou Screamin Jay Hawkins, mais déjà l'idée effleurait ton esprit, musicalement les premiers noms qui s'imposaient à toi étaient Black Rebel Motorcycle Club ou Band of Skulls, deux groupes dont le rock trouve ses racines dans ce bon vieux blues.

Tandis que des applaudissements nourris et des cris enthousiastes saluent la première salve, Damien engage 'You got it' , un midtempo bourré de reverb, qui suinte comme les meilleurs valses western rock concoctées par d'autres Frenchies amateurs de Nick Cave, Morphine ou Soul Coughing: Broken Waltz!

They got it, for sure!

Rak tak tak,.. c'est Rémi qui racle un truc ressemblant à un güiro cubain, c'est parti pour une pièce vaudou, intitulée ' Les fleurs séchées' .

Andy a déposé sa Gretsch pour saisir  un micro et entonné un tango malsain, tandis que  Damien Félix s'amuse avec la vibrato handle de son jouet pour en tirer des trémolos que n'aurait pas reniés David Lynch pour illustrer une des fictions dont il a le secret. 

Rémi, sans relâche, tabasse fûts et cymbales et Mathis, l'impressionniste, ajoute du piment à une sauce déjà  savoureuse.

 

A tes côtés, une dame d'âge mûr n'a d'yeux que pour le ténébreux chanteur, qui dégage une aura irrésistible, ce mec rayonne et envoûte,  avec son charisme inné, il pourrait se transformer en dieu cosmique et t'inviter à rejoindre une secte suspecte.

Arpèges, dentelles et moog câlin  amorcent la valse  ' All seasons' , presque murmurée par Andy, t'as fermé les yeux et tu l'as vue danser, la Russian doll, et quand il fredonne.. You change like the weather, t'as pensé au climat breton, mais soudain, il s'est mis à implorer je ne sais qui, ce fut impressionnant.

Pour ' The man in the mirror' ( dont le titre sonne 'Ballad of Another Man' sur l'EP 'Bastion Session')  the guy from Leeds, (un des seuls Anglais qui ne s'intéresse pas au soccer), a ramassé une guitare acoustique, accroupi il assiste à l'ébauche furieuse du morceau décochée par la guitare de Damien .

One, two, three... lance Rémi, la machine est définitivement lancée pour un surf rock  renvoyant aussi bien vers le fabuleux et regretté guitariste James « Calvin » Wilsey, dont le riff célèbre a fait de 'Wicked Game' un des morceaux phares de Chris Isaak , que vers la B O de Pulp Fiction, pour laquelle Tarantino a utilisé la perle ' Misirlou' de Dick Dale.

Oui, Francine, quoi, ses yeux?

Tout à fait ceux de la mimique de Jack Nicholson dans 'One Flew Over the Cuckoo's Nest'.

Ah, oui, c'est évident, rien à voir avec le regard souriant béatement de Cristiano Ronaldo. 

Mathis fait sonner le Farfisa comme un harmonium pour lancer ' Good God', qui démarre tout en caresses avant d'exploser dans un second mouvement dramatique, poignant et tourmenté... I recite the same old lines, hold them against me, they're heavy on my mind... il le crie haut et fort . 

Aucune réaction  Dieu est il  sourd?

Une décharge finale aurait dû tirer le créateur de sa léthargie, dans le cabaret, en tout cas,  personne n'a fait la sourde oreille, on a tous acclamé, à tout rompre, le chanteur et sa clique.

Un nouveau prêche est lancé, ' Manchester', dixit la setlist, un regard de tueur fou fixe quelqu'un ou quelque chose dans l'assistance, les copains ont amorcé un tango aux senteurs Mersey river, tandis que la ville sombre attend l'arrivée improbable du soleil.

C'est beau et mélancolique à la fois, car toi, en tant qu'amateur de foot, tu penses au flamboyant George Best.

Avec ' Too far gone' on revient vers l'EP 'Bastion Session' , James « Calvin » Wilsey introduit,  avant de voir le truc  virer guitare saturée. Pour  déchirer la rythmique cha cha cha, un orgue pointilliste contrebalance les piqûres de la Gretsch, tandis que le chanteur, nonchalant,  narre son récit.

Et Francine, les yeux clos, tangue.

 Sur scène, Andy joint le geste à la parole, à genoux il psalmodie ..

 I'll kneel at the foot of God,But he can't redeem a thing I've done.Everything that I've become,It's too far gone....

T'as voulu le bénir,  tu t'es souvenu être un prêtre défroqué. 

Hier j'avais lancé un CD dans l'assistance, j'ai éborgné un pauvre gars, ce soir je refile l'album à la petite Amandine, une gentille gamine assise au comptoir.

Revenu sur scène, il lâche, next song is a dark one et c'est  l'hymne ' Bells and fists' qui vient nous secouer . Rémi a placé un couvercle de casserole sur une cymbale, il tape dessus sans douceur, la guitare zigzague sans répit et la chorale satanique couvre le tintement du carillon,  la marche démoniaque se poursuit jusqu'au champ du repos.

On arrive au bout du voyage, this is our last song, but, Plouha,  I'm sure we'll meet again, somewhere.

In hell, maybe?

En attendant on les accompagne sur une route brûlante  ' It takes the long road' qui contrairement à l'annonce n'était pas la dernière tirade, car le morceau se fond dans l'incroyable  rondo ' The belly of the jungle' qui voit la résurrection de Jim Morrison et de Ray Manzarek, Lucifer ne voulait plus d'eux.

Une improvisation royale, qui rend fou et  pendant laquelle les duels se succèdent, Farfisa/drums, Gretsch/ Farfisa  et  voix satanique ...welcome to my house... , une baraque surchauffée où des fantômes chantent  ... break on through to the other side.... après un final délirant, le band, en sueur, prend congé pour très vite revenir  signer leur EP, qui se vend mieux que les croissants du dimanche.



Déjà le concert de l'année?

It can be....


Un band à ne pas rater, s'il passe dans ton  coin, bientôt ce n'est plus dans un bistro pouvant contenir une soixantaine de pelés que tu pourras les écouter, tu devras te procurer des jumelles pour les voir aux Vieilles Charrues ou aux Eurockéennes.